24.3.12

Le champ de sable #the last

Il la regardait, interloqué.
Pourquoi riait-elle?
Macha n'arrivait pas à s'arrêter. Le rire nerveux qui la secouait semblait inextinguible. Le militaire n'avait pas encore vu le corps, il l'a prendrait vraiment pour une folle quand il serait plus près. En même temps, elle ne pouvait pas lui expliquer qu'après la vision de la femme allongée au sol, les voir apparaître ainsi grimés, comme sur le champ de bataille qu'elle n'avait jamais vu qu'à la télé, le ridicule de la situation avait pris le dessus.
Il était sérieux, le regard de l'homme. Presque agacé. Elle dérangeait.
"Vous n'avez pas vu les panneaux?"  gronda t-il
Les panneaux? quels panneaux? ceux qui, à chaque sentier qui descendait sur la plage, indiquaient "baignade interdite"? ou bien "naturisme toléré"? comme si elle avait envie de se baigner, nue encore moins, avec cette bise piquante!
Elle ne répondit rien, toute à reprendre son souffle.
C'est alors que l'homme des sables vit l'enfant et la femme inanimée.
Il fit un geste à son équipe derrière lui, pendant que le super-frelon qui tournait encore au-dessus de la dune s'éloignait, évitant de projeter le sable à tout va.
Il ne toucha pas le corps, attrapa la radio fixée sur son plastron pour donner des directives à l'hélicoptère, et transmettre les données.
Il regardait la femme muette à présent que son rire s'était éteint, elle lui rappelait sa Katy, mais la ressemblance s'arrêtait là. Les cheveux sans doute. Elle les avait blonds et longs, même si elle les avait rassemblés en une queue de cheval épaisse. Le vent s'était chargé du crêpage, efficacement.
"Vous connaissez cette femme? demanda t-il.
-Non, répondit-elle enfin. Je marchais sur la plage. Et non je n'ai pas vu les panneaux. Pourquoi"?
-Vous êtes sur un champ de tir madame, nous sommes en plein exercice. Vous n'avez pas le droit d'être là.
 L'enfant dans les bras de Macha se tortillait à nouveau.
A y regarder de plus près, le visage de la femme brune au milieu du sentier perturbait les souvenirs de Macha. Elle l'avait déjà vue, elle en était sûre. Peut-etre une touriste comme elle, qui avait quitté la grisaille parisienne pour venir se ressourcer sur la côte ouest. Tout le monde va sur la côte ouest. C'est à la mode. Le Parisien aime la côte. Il se nourrit du sable et de l'air iodé, il engloutit des crêpes, s'achète un ou deux T-shirt rayés, ou bien une veste de quart qui le protégera du cuir des sièges de son véhicule tout terrain, garé sur les trottoirs parisiens.
Une image lui revint en mémoire.
Le couloir de son service, et le sourire timide d'une femme, petite et brune, qui emportait son bébé.
Sauf qu'ensuite, l'hôpital tout entier avait vibré d'émotion quand on avait appris qu'un bébé avait été enlevé de la maternité. Au moment de l'enquête elle avait parlé de cette femme qui marchait vers la sortie, elle en avait fait un portrait robot, et seuls les quelques mois écoulés avaient effacé de sa mémoire les traits de la femme qui se trouvait à ses pieds.
"Je la reconnais! s'exclama t-elle.
En un instant, Macha avait saisit l'ironie morbide de la situation. Une balle des militaires en exercice avait sans doute touché la femme, femme recherchée dans tout Paris et alentours depuis des mois, en vain et pour cause, par les services de police débordés.
Macha s'était souvent posé la question du pourquoi d'un tel acte, le vol d'un enfant. Elle avait vu le désespoir de la mère, l'impuissance, la haine, la colère, la tristesse infinie à mesure que s'écoulait les heures. On avait jamais retrouvé l'enfant.
Et voilà que dans ses bras se tenait sans doute le petit être qui avait à peine connu sa mère.
Macha se disait qu'il n'y avait pas de hasard.
Elle se disait aussi qu'il y avait bien des peines.
Au loin, une ambulance hurlait.

End.

5 commentaires:

  1. En Fin ! Enfin, c'est la fin...^^
    Bon, l'ensemble est bien, bel essai de roman et c'est réussi ! ^^
    Besos Tifenn ♥

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  2. Fallait bien une fin! merci de tes encouragements El Pirate!

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  3. Je reste avec un creux, une faim pour cette histoire et non cette fin là.
    et je compatis : j'aime démarrer dans l'enthousiasme d'une idée et, perso, je suis moins bonne dans la fin, surtout quand il y a d'autres trucs urgents sur le feu...n'est ce pas ?

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    1. Non non, je ne t'en veux pas, je n'ai pas aimé écrire la fin. Ce qui m'a plu dans ce petit machin c'est de créer des personnages et de les "voir". Je viens d'avoir une autre idée de fin. Attends...

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    2. J'avais compris que Camille avait volé un bébé, mais je ne m'attendais pas à cette chute ! Bravo !

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