27.6.08

Dieu


Elle disait: "je plains ceux qui n'ont pas la foi"
La vieille avait le regard clair, un horizon sans fin comme celui de son pays de naissance. Elle le disait dans l'épreuve, quand le corps souffre et que l'âme se tourne vers un sauveur.

La fille, elle, ne croyait plus. L'existence d'un Dieu, de plusieurs, lui paraissant aussi peu vraisemblable qu'une paix universelle.
Elle le gardait pour elle, pour ne pas fâcher, déclencher un oeil noir, l'oeil sévère qui lui faisait encore peur.

En son for intérieur, elle trouvait que cette histoire de Dieu c'était un peu trop facile. Un Jésus peut-être, genre un type génial, oeuvrant pour l'entente communautaire...mais un Être supérieur, immatériel, sans existence propre, non. Juste une idée d'hommes soucieux de relayer un état d'esprit (ah ah) dans un monde de plus en plus voyageur. Ou d'hommes mégalomanes, s'imaginant pouvoir plaire à tous en utilisant les travers de l'âme humaine pour pouvoir mieux manipuler. Fonctionner à la peur: "Dieu est partout, il te voit, il est là, attention, soit sage".

Fonctionner au chantage "si tu n'obéis pas, tu vas aller en enfer, brrr". Fonctionner sur l'appât du gain "donne un sou, tu en aura cent".

Bon, le fille avait une réflexion simpliste, mais elle se disait qu'il valait mieux compter sur soi-même, croire en l'homme, fort ou faible.

Cela dit, les oeuvres que les hommes ont créées pour une idée, la laissent toujours abasourdie. Elle respecte l'idée d'un Dieu, elle respecte les hommes, surtout quand elle voyage et voit ces merveilles édifiées à la gloire de Rien.

Elle se dit qu'après tout, l'homme fait de belles choses. Même si c'est pour assurer son salut.


Baptème en la cathédrale Saint pol de léon

Photo du WE du 22 juin.

15.6.08

La vie, ici.




Parfois, on se retrouve sur la plage. Il fait chaud. C'est même une chaleur exceptionnelle dans nos contrées où le vent a souvent raison des degrés. Faut croire que les scientifiques ont raison, il fait de plus en plus chaud.

Sur ce sable granuleux, jaune, blanc, parsemé d'algues qui ne sont pas ramassées par les habituels tracteurs avec leur long râteau qu'ils traînent, comme un balai ramassant les déchets de la mer.

Non, ici, les algues sont noires et sèches, marquant la limite supérieure de la montée des eaux. On sait donc assez vite si le coefficient est fort ou pas.

Mais peu importe. Si on donne cette réponse au touriste qui s'interroge, c'est pour faire breton. Parce qu'au fond ici, peu importe les forts "coefs", la marée descend de toute façon très bas sur cette vase noire et chaude qui abrite de quoi nous nourrir un plat du dimanche.

L'été, point de baignade à marée basse, il faut attendre les semaines où l'eau remonte en fin d'après midi sur les hauteurs, pour pouvoir nager dans l'eau salée profonde du haut d'une cuisse au maximum.

Alors, oubliant l'aspect noir et peu ragoûtant de la vase, les pieds s'avancent dans l'eau très chaude, frôlant parfois une algue, frémissant de se dire que c'est peut-être un crabe vert. Et finalement, s'engouffrer la tête la première dans ce bain de mer, et embrasser plusieurs longueurs sans but autre que celui de la liberté.

Quelques aventureux se jettent à l'eau aussi, je parle des adultes parce que les enfants eux nous ont précédés depuis bien longtemps, n'écoutant que leur plaisir.

Pour rire, on fait la course jusqu'au bateau mouillé plus loin, en rêvant que ce pourrait être le nôtre, qu'on aurait plus qu'à monter à bord pour rejoindre en quelques mois, des rivages encore plus enjôleurs.

Mais non. Notre paradis, il est ici. On y trouve tout le nécessaire, comme ces soirs où seuls sur la plage, nous pique-niquons, regardant le soleil descendre sur la côte qui nous fait face, un seau plein de coques et palourdes pêchées en une heure à peine à nos cotés. Nous sommes biens, nous ne parlons pas, nous admirons, quiets.
Le lendemain, je sais que je ferai des
pâtes fraîches pour accompagner ces fruits de la mer, encore généreuse pour ceux qui l'aiment.

Voilà pourquoi, les jours de peine, un moment de réflexion, un rappel de ces instants, ou juste aller voir ce paysage, me fait penser que le bonheur est à une encablure d'un neurone récalcitrant. Les hommes sont aussi faits de ce qui les entourent. Enfin, c'est ce que je pense quand je sais le bonheur d'habiter ici.

Hem. Ah oui, Bonne Fête Papa!

9.6.08

Matins

Se lever quand les ombres s'allongent encore sur la terre mouillée
Regarder le soleil agrandir son obole
Laisser briller la perle sur la feuille frémissante


Écouter le réveil des oiseaux, s'en étonner...

Voir le ciel sans nuage,
Se dire que le bleu lui va bien
Espérer


Entendre le chant de l'enfant, sourire...

Prononcer des mots doux, rien d'inutile,
Apercevoir la frimousse d'un bambin
Lui donner la main


Lire dans leurs yeux, traduire...

Et enfin, s'éveiller.

2.6.08

Le Maître Âge

La première chose que l'on dirait d'elle en la croisant dans la rue c'est: "elle est blonde". Reflexion de brune bien sûr.
On lui dit encore "mademoiselle", elle en ouvre la bouche d'étonnement. C'est un temps lointain celui des enfants qui la tutoyaient, des vieux qui lui posaient un doigt sur la joue, un soupir sur la peau.
Et pourtant.
Dans sa voiture, les jours de grand beau temps, elle fait voler ses cheveux au vent en ouvrant ses fenêtres, toutes.
Elle pousse le volume quand Polnareff s'égosille, elle l'accompagne aussi.
Un jour qu'un indélicat lui demandait son âge, elle répondit de trois ans de moins, ça ne le regarde pas, non mais. Le blanc silence qui suivit sa réponse avait l'effet escompté: il ne la croyait pas, croyait-elle, mais non, il lui dit juste "ah bon, vous ne les faîtes pas ". Dans quel sens, aurait elle voulu lui rétorquer, histoire de le gêner un peu.
Et puis, les femmes qu'elle croisait, qui jugeaient de son accoutrement, un jour mère, un jour femme d'affaire, jamais encore femme du soir, ces femmes, pas si différentes qui souriaient, se posant la question secrète du :"comment fait-elle?", un peu jalouses au fond.
Le maître c'est l'âge.
Il vous classe, il vous surpasse, il vous hante, il voous dépasse, et vous êtes juges.
Trop vieille, la blonde, pour ce poste, trop jeune pour être ce qu'elle dit la blonde, trop blonde pour être vraie?
Un autre jour, dans la vraie vie, le seule qui soit, celle qu'elle vit en sa famille, ses gènes, sa progéniture, ses amours, un fils lui dit:"t'es vieille comment? comme un arbre? comme une fourmi? comme papa? mais alors, pourquoi t'es plus petite, si t'es plus vieille?"
Le mètre âge.
Celui de l'enfance, celui qui compte par la taille, la hauteur, pas encore la grandeur. Si tu peux toucher les nuages, tu es vieille, très vieille, mais qu'est ce qu'on t'aime.
Un jour la blonde est devenue mère, elle était jeune maman, même à quarante ans, tant qu'elle est grande , la jeune mère, elle est plus vieille, mais un jour, il la dépassera. En taille.
Les vieux, c'est bien connu, un soir ils rapetissent. C'est l'enfant qui leur tapote le dos, qui leur tient la main pour traverser les clous. C'est bien un truc de vieux ça, de dire les clous.
La blonde, elle a ce "je ne sais quoi" qui l'empêche de vieillir. Cette naïveté dans l'oeil, cette façon de croire en l'homme, avant de croire en Dieu, un état d'esprit de l'utopie encore possible.
Femme, tu es vieille, plus vieille qu'hier, mais femme, tu es plus jeune que demain, alors ne desespère pas, et roule ma poule.