29.6.11

...Et Dieu...(petite histoire inventée de Dolmens)

...créa la terre.
La bonne blague!
Dieu avait la mainmise sur l'invention d'une nouvelle espèce endémique, l'humain. Mais tout là-haut, là-haut, ils n'étaient pas vraiment d'accord. Mars s'entêtait à placer des bâtons devant les roues divines, Vénus avait mis la pomme en grain de sel, et Jupiter, ah! Jupiter! (Jusqu'ici le bras droit de Dieu, ayant toute sa confiance et sans doute la plus grande partie de son pouvoir) Jupiter, disions-nous, se fâcha tout rouge le jour où les dinosaures furent exterminés par une colère capricieuse de Dieu, un jour que Vénus lui refusait de condescendre à ses avances. Dieu n'était pas sexy, et Vénus ne s'en laissait pas conter.
Si tu cherches à connaître la vérité de tes origine, petit humain orgueilleux, tu seras surpris de voir que toute cette histoire n'est que vanité, colère, frustration et caprices.
Mais.
Il y a toujours un mais, n'est-ce pas?
Un jour de banquet, imagine le banquet, tous les dieux (les Douze comme ils s'appellent entre eux) et Dieu, sont assis autour d'une éclaircie leur donnant à voir le festin que les humains leur préparent, et ils boivent (Dionysos sait toujours avant eux le vin qu'ils préfèreront), attendant que les offrandes soient offertes. Il fait toujours beau au-dessus des nuages, c'est facile de savoir comment se vêtir chaque matin, en fait ils ne se donnent même plus la peine de réfléchir, une toge blanche c'est bien assez. Ils boivent, l'apéritif est un moment sacré.
Et puis, le vin monte à la tête.
C'est dangereux de faire boire du vin à des dieux. Les conséquences peuvent être terribles.
Une dispute éclate soudain entre Dieu et Jupiter, chacun d'eux voulant s'accorder la première place, dieu des dieux. Iznogoud* n'a rien inventé.
Dieu et Jupiter se font face, terribles, puissants, immenses, géants. Ils se jaugent, se mesurent des yeux, se foudroient. Les autres ne font plus les malins. Leur conférence de Yalta** est remise à plus tard, pour le moment ils savent bien qu'ils n'ont aucune chance de récolter quelque planète que ce soit, ils attendront la fin de la bataille et ramasseront les miettes du partage.
Jupiter et sa foudre lancent des éclairs. Dieu sépare les eaux, jette des poissons, des grenouilles, des serpents. Une pluie brûlante fait hurler les humains plus bas.
Soudain, la lance de Jupiter s'envole dans l'espace inter-sidéral, tel le vaisseau de Dark Vador***. Mais.
Comment ça un deuxième mais?
Oui, un rebondissement, dirons-nous.
La lance heurte une planète. Celle-là tu ne peux pas la connaître car elle n'existe plus depuis ce jour funeste. Explosion. Granitus est éparpillée par petits bouts façon puzzle. Zeus ne correctionne plus, il dynamite, il disperse, il ventile****.

Des années plus tard (je dis années, mais les dieux s'en fichent du temps), un type se balade en forêt avec son chat. C'est la première fois qu'il vient là. Il fait beau, c'est l'été, les fougères sont hautes, les feuilles des chênes vertes et charnues, l'ombre est propice à la méditation, alors que dès l'orée du bois le soleil tape.
Il pose ses fesses sur l'herbe, son dos appuyé contre un rocher. Il hésite à sortir un livre de sa besace, il n'est pas lecteur, c'est une bonne âme qui lui a fourré ces pages dans son sac. Il préfère dégoupiller son canif, et torturer une branche de bois lisse trouvée au sol.
Il rumine.
Ses mains trahissent ses pensées sombres. Des étincelles jailliraient du bois qu'il taille s'il n'y prenait pas garde. Faudrait pas mettre le feu, non plus.
Au temps qui passe, son dos se détend et sa colère se dissipe.
Le chat cesse de fureter et vient se poser contre sa cuisse. Il est noir, le chat.
L'homme s'endort.
Il rêve.
Le chat aussi. T'ai-je dis le prénom de l'animal? Crépidule. Il ne fait qu'un avec son maître.
Ces deux-là, allongés dans l'herbe, s'agitent. Leurs paupières tremblent, on devine dessous leurs yeux qui roulent. Les membres sont pris de mouvements brusques, comme s'ils tombaient d'on ne sait où.
Ils cauchemardent peut-être?
Moi, je vais te dire.
Ils se sont assis là où il ne faut pas. Je ne sais pas si je vais décider de les laisser en vie ou pas, ces deux-là. Sache, et tu comprendras, qu'ils sont sur un lieu chargé d'histoire, de pouvoir, de force tellurique et céleste à la fois, oui, ça existe les endroits comme ça.
Contre le dos de l'homme, un dolmen. De ces pierres granitiques tombées du ciel un jour où Jupiter et son pote Dieu se faisaient la guerre. Jupiter a gagné. Mais, partout sur Terre, des morceaux de Granitus, la planète envolée.
Les humains qui sont entrés en contact avec ces blocs de poussière planétaire, soit sont morts, soit sont devenus druides, ou fous, ou mystiques. C'est que l'esprit humain ne peut pas entendre telle vérité. Ne peut pas l'appréhender. C'est plus grand que lui.
Alors, pour plaire à la fois aux dieux et aux hommes, les quelques Inspirés, des Justes presque, ont tenté de rassembler en une forme arrondie, douce, ces poids énormes. Ils ont fait croire à un abri, à un autel, à des sculptures de gaulois irréductibles...ils feraient croire n'importe quoi, pour que l'homme simple d'aujourd'hui accepte l'idée de ces roches étrangères. On en leur dira pas "extra-terrestres", ce serait trop.
Crépidule émet un long miaulement. Et se tait.
Crépidule, c'est mon chat fétiche, je me suis déjà servi de lui à Saint-Cado. Cette fois encore, il va sauver une âme. Parce que je suis trop bonne.
L'homme se réveille, engourdi, étourdi, ahuri. Il voit son chat près de lui, mais ne le reconnaît pas. Il est devenu gris.
C'est l'effet dolmen.
La nuit, tous les chats sont gris.
Et la souris danse.
Et le breton est têtu.
Et la bretonne...
Se tait.

* Iznogoud, celui qui voulait devenir calife à la place du calife.
**Conférence de Yalta, ou comment partager un gâteau.
***Dark Vador, le méchant.
****Inspiré des dialogues d'un film cultissime.

Voilà. Sur une idée de Ariana Lamento, dans un commentaire sur le billet précédent, sur le temps de cuisson du gâteau chocolat de ma grande.

27.6.11

Travail? Vacances?

Il ne t'aura pas échappé que je suis peu présente ces temps-ci.
Tu te dis peut-être, comme je l'entends encore, mais puisque tu es à la maison tu as du temps, voire, être à la maison, c'est ne rien faire...
Je vais te dire...
Oui, j'ai du temps.
Du temps pour eux, du temps pour les Zotes, du temps pour la maison qui par définition se doit d'être accueillante, pour les enfants puisque j'en ai trois.
Je m'agace ostensiblement à présent, quand on croit, quand on me dit, quand on pense, que je ne fais rien de mes journées, puisque moi, chaque matin je ne prends pas ma voiture pour aller embaucher à 8 heures.
A vrai dire, j'ai failli. Le plein temps.
Je connais le "travail, le vrai", celui qui te mobilise à l'extérieur, 8 heures par jour, pour gagner ta croûte. Je connais les jours aux 5 lessives,  la fatigue dans les jambes en rentrant le soir et le soupir pour le repas à préparer. Voire sauter. Je l'ai fait. Avec deux enfants. Avec les frais de garde, les frais de gasoil, le bordel dans les chambres, la tête dans le guidon.
Pour un "travail, un vrai" qui ne me plaisait pas.
Certains aspects pourtant, peuvent me manquer, parfois, l'hiver. Les Gens. Le contact. S'apprêter aussi pour aller maquillée (ou non) coquette etc, me placer derrière un guichet, un bureau.
Ce qui ne me manque pas, c'est le bourrage de crâne, la répétition des gestes, le train-train immuable, attendu, la perte de mes neurones à chaque retrait d'argent, les mêmes phrases aux téléphones pour vendre un produit parce que la personne avait été choisie par un logiciel comme "appétante", ou bien "profilée", on lui créait un "besoin".
Je rentrais, je n'avais pas vu les premiers pas de ma fille.
Maintenant, je suis "à la maison". Alors, c'est connu, je glande.
C'est vrai, "un travail, un vrai" c'est produire quelque chose, rapporter, être une valeur ajoutée à la société. Alors, à la maison, je ne crée rien, n'est-ce pas? je ne vends rien, donc, je ne rapporte rien.
Ne me dis plus jamais, qui que tu sois, que j'ai le temps et que être à la maison, c'est pouvoir adhérer à tous les trucs bénévoles (tu ne rapportes rien, mais donne moi tes bras pour que tu sois au moins utile à quelque chose), dire oui à toutes les réunions à toutes les heures (ben oui, tu n'as pas de contrainte horaire) et tant qu'à faire, tiens, c'est toujours toi que j'appelle pour aller réceptionner un colis, puisque moi, j'ai "un travail, un vrai", et que je ne peux pas être là.
Je vais te dire, une vérité vraie.
Je n'ai PAS le temps.
Je suis là, mais je ne suis pas là.
Ce qu'il me plait de créer ne rapporte rien de concret. Ou si. Un art de vivre. Un contexte. Je favorise ton environnement. Je crée un cadre. Comme je cadre les photos et que je choisis mes mots.
Parfois, j'ai l'impression que je sème. Une graine, une plante inconnue, dont le fruit peut mettre des années à maturer. Je ne sais pas ce que je vais récolter. Je m'en moque à vrai dire. J'aimerais bien récolter quelque chose mais ce n'est pas mon but premier. Pas encore. Il me faut vivre, pour le moment, à ma façon, aussi bien que je peux, en correspondance avec l'idée que je me fais de la vie. Je n'ai pas un rond, mais j'ai un jardin. Je peux être à découvert, mais la mer aussi découvre le sable à quelques pas de chez moi. Je mange des pâtes? oui, mais j'aime les pâtes.
J'ai, avec Lui, créé la chambre d'hôtes. Parce ce que nous aimons les gens, parce que nous aimons notre Bretagne et que nous aimons partager. Nous pourrions augmenter les prix. Mais alors, nous perdrions les zôtes qui nous ressemblent. Ceux qui partagent les mêmes goûts, idées, valeurs parfois.
Mon travail, le vrai, c'est celui qui ressemble à vos vacances, puisqu'il se doit de vous faire sentir bien, en vacances.
Mon salaire, c'est votre sourire, votre plaisir, vos mmmmm, ou exclamations de contentement.

Mon salaire, c'est le plaisir que j'ai à faire des salades de fruits qui ressemblent à des fleurs. Façonner le pain. Sentir le pain d'épices quand je tranche en plein.
Mon travail, le vrai, est à l'intérieur. A l'intérieur dans la maison, à l'intérieur de vous, toi, moi.
Ne dis plus jamais qu'à la maison, qui que ce soit, glande.

Mais comme je ne suis pas rancunière, je te donne quelques photos, de mon travail, de mes vacances...

ps: je ne vise personne, seulement les idées préconçues...

22.6.11

Radio émotion.

J'avais l'intention de fermer les yeux quelques minutes. S'allonger, fermer les yeux. Ecouter la radio. J'adore écouter la radio les yeux fermés. Pas les infos. Les histoires d'agression, de meurtres et de bactéries, n'aident pas au repos. C'était l'après-midi. Mon fils venait de nous faire un dessin de chat, un joli chat bondissant, qu'il a déposé sur la couette, à côté de moi, "pour papa et pour maman de la pare de M."
Et puis, j'ai entendu cette voix âgée, très âgée, avec de la difficulté à respirer, un homme de 95 ans qui dit les mots d'un autre, les poèmes qu'il connaît par coeur, un de Tristan Corbière, un breton, comme il dit. Il le récite à la journaliste. Je suis saisie par la beauté du poème, à demi endormie. Je réalise que je n'entends bien les mots que quand je suis au repos. Qu'ils ont alors, plus de force. Je peux les goûter pleinement.
C'est comme certains de vous que je lis, je suis séduite, souvent par les textes, les phrases, parfois juste quelques lettres assemblées.
Quand je suis dans l'action, tous les jours, incapable de trouver un moment, sans que j'en "manque" parce que le quotidien me plaît aussi, je ne peux pas lire de la même façon.
Alors, ce vieil homme qui récite. Comme si c'était pour moi, parce que c'est à la radio, juste dans le creux de mon oreille, une voix.
Et puis, on apprend que l'homme est mort. La journaliste (la petite-fille de l'homme) revient voir sa grand-mère. Parler de son Papi. "Ce qu'il reste après". Après l'amour, après la mort. La grand-mère à la voix vive et rieuse, raconte. Elle parle à son homme parti. Elle réchauffe son urne qu'elle trouve trop froide. "J'en suis là", dit-elle. Et la voilà qui récite à son tour les poèmes qu'elle n'écoutait que d'une oreille du vivant de celui qu'elle aimait, elle les apprends à son tour.
Comme si, à travers les mots des autres, elle conversait encore avec son mari.
Ce qu'il reste après, ce sont encore les mots.

Emission de Daniel Mermet "Là-bas si j'y suis"

mercredi 22 juin 2011

Les derniers jours



"Celui qui cy maintenant dort
Fit plus de pitié que d'envie,
Et souffrit mille fois la mort
Avant que de perdre la vie.
Passant, ne fais ici de bruit
Garde bien que tu ne l'éveille :
Car voici la première nuit
Que le pauvre Scarron sommeille."
Épitaphe de Scarron

Les derniers jours d'un grand-père, René, enregistrés par sa petite-fille, Inès.
Avec la grand-mère, Jeanne.
Un reportage d'Inès Léraud

19.6.11

Ceinture.


Aplati sur un tatami, il essayait de le soulever. Impossible. La sangsue collée au sol bleu, pesait un poids mort, personne n'aurait pu, sauf s'il le voulait. C'est la première vision du judo que j'ai. Cette faculté de maîtriser son corps, en faire la matière dont chaque particule se contrôle et empêche tout contrôle d'un autre.
J'ai tenté à dix ans, puis je me suis tournée vers le karaté. Pour quelques petites années. J'ai tout oublié sauf le premier kata qu'un gamin de six ans saurait faire mieux que moi.
Parfois, on retrouve des histoires en ouvrant les malles. Les kimonos que me tendaient ma mère, nous appartenaient à mon frère et à moi. Je touchais avec émotion le tissu crème, épais, au tissage serré. Ceux-là seront peut-être à la taille de mon fils, disions-nous. 
La veste porte un petit carré cousu à l'angle droit du revers. Il dit "Choses, Saint-Pierre, Réunion". Avec un dessin de deux judokas ou karatékas. "Choses", c'était le magasin où les kimonos ont été achetés. Je ne sais pas s'il existe encore. Mais le passage de ces kimonos à mon fils prouve qu'il en reste quelque chose. 
A genoux, sur la scène avec ses 119 autres compagnons, il attend. Fier. Il essaie de ne pas sourire, mais ses fossettes le trahissent. Et puis, il reçoit sa nouvelle ceinture. Une blanche et jaune. Il salue. Il sourit, franchement. 
Il est beau.

17.6.11

Pluie.

Depuis des jours, elle marchait comme dans un désert. Le bitume de la ville fondait sous le caoutchouc de ses semelles, la retenait, l'empêchait de lever haut les genoux, elle se trainait, emportant avec elle un bout de route à chaque pas. Sur ses épaules, la courbe du soleil qui ne faiblissait jamais, à toute heure il était midi, elle sentait sa peau frire comme un bacon anglais, ce qui lui donnait encore plus soif.
Levant la tête, le ciel était immanquablement bleu.
Chaque voiture qui frôlait ses jupes, laissait s'échapper un vent nauséabond de fumée toxique, qui n'apportait aucune fraîcheur. Juste une plus grande apesanteur.
Il lui restait le secours des boutiques, au grand dam' de son porte-monnaie, la réfrigération des grands espaces sous une lumière blafarde lui donnait le cafard. Elle sortait presque en courant, abattue de tant de mauvaise volonté.
Sous la tonnelle, un café.
Au plafond, à l'ombre, une vigne, dont elle aurait aimé manger les grappes, vertes et juteuses, hors de portée. Un thé, comme concocté avec les mains de son amie, au fruits rouges, parfumé, odorant, une promesse de plaisir avant même que l'eau frémissante en recouvre chaque feuille plissée pour la rendre entière, de l'eau, enfin.
Elle se lève, sentant à la lisière de la ville l'appel de la campagne, de l'herbe, drue et sèche, assoiffée comme elle, soeur jumelle recherchant au fond de la terre, à travers de longues racines, la nappe où se repaître.
Levant la tête, soudain, des nuages, noirs, menaçants, attendus, espérés. Vont-ils?
Elle marche. Sa jupe collée à ses cuisses, bouffant parfois, quand une rafale de vent.
Entends-tu? Ils grondent, ils rouspètent, de toute cette chaleur accumulée.
Ils se crèvent d'un coup, un rideau, une masse, une pluie torrentielle qui la noie, bouche ouverte.
La terre, près d'elle se soulève, s'aère, s'ouvre, se gorge, elle sent une odeur particulière, musquée, chaude, la pluie qui fait l'amour à la poussière, une brume de chaleur trouble la netteté du sol, elle respire, elle aspire, ouvrant les bras à cette onde fraîche.
La terre, sous elle, trempe ses pieds de boue, s'insinue entre ses orteils, recouvrant la peau craquelée d'un baume bienfaisant.
Elle voudrait se jeter au sol, imprégner sa peau, absorber, l'eau et la terre mêlée.
Il pleut.

14.6.11

Un foyer?

J'ai connu des tas de cuisines. 
Evidemment quand on déménage tous les quatre, voire tous les ans, ça en fait des maisons. 
Je crois bien qu'une des premières dont je me souvienne, à part celles des grand-mère, quoique cuisine soit un mot très inadapté pour l'une d'entre elles, et pourquoi dis-je "elles" d'ailleurs, j'aurais pu dire "il" aussi, puisqu'il apportait le gâteau du dimanche, bref, une des premières, est blanche. 
Etait-ce du formicamidable? Le truc où l'on aurait bien du mal à parler d'obsolescence? (rien que dire ce mot, alors l'écrire, je te dis pas, et déjà tu te sens plus intelligent, alors qu'en fait c'est qu'on (la société de consommation, les méchants tu vois) te prend pour un Con, oui, je dis des gros mots, et celui-là jamais au féminin, va savoir pourquoi). Oups, je digresse, mais c'est à l'insu de mon plein gré, vois-tu, On (mon homme et moi) a été très fâchés aujourd'hui avec la société de consommation. Une histoire de Hotte. 
Pas celle du Père Cocabidule non, celle qui fait du bruit dans une cuisine. 
La nôtre ne fonctionne pas depuis, allez, à la louche, deux ans, elle était juste là pour faire joli, on posait des trucs dessus aussi. Puis on l'a démontée hier, tu sauras pourquoi taleure, si je termine, tellement j'ai de l'énervement en moi, là, tu sens. On l'a démontait un peu pour s'en débarrasser, un truc qui ne sert à rien, on fini par jeter. Par acquit de conscience, monsieur jette un oeil, juste un, et voit le truc de travers, celui qui tourne dedans, forcément pas dans l'axe, axe cassé, axe réparable, se dit-il. 
Et voilà qu'il découvre que deux pièces en contact avec l'axe, sont juste collées entre elles. Une hotte, ça vibre, la pièce se décolle, le truc casse, et toi tu fais quoi? soit tu payes un réparateur, t'as pas les sous, soit tu décides de te passer de hotte. Ou bien tu répares. Une vis plus loin, c'est chose faite. Une vis. Tu sais, un truc qui ne se décolle pas au bout d'un ou deux ans d'utilisation...Comprends-tu le pourquoi de ma fâcherie?
Première cuisine blanche, donc, et dont les meubles si ça se trouve, sont encore debout. 
Puis ensuite, en bois. Des portes en bois. Ce sont des pièces où je passe, mais où je ne reste pas, m'intéresse pas tout ça, sauf pour piquer dans les plats. La cuisine par la fenêtre de laquelle je voyais passer le fantôme de ma grand-mère, celle qui avait une cuisine sans doute, un endroit où la popote popotait, mais bon, une cuisine? 
Puis ensuite, une formica marron. Pas formica? oui, peut-être mais marron c'est sûr. Et des portes qui claquent quand on les ferme. Une table dans la cuisine. On y mange sous la lumière blanche du néon, et on voit un prunus derrière la fenêtre. Les repas y sont toujours animés. On cause, on crie, on boude derrière ses boites de céréales...Je crois bien que toutes ces cuisines étaient moches au final, question déco veux-je dire, je ne me souviens pas d'y avoir vu de couleurs. Mais qu'est ce qu'on y passait comme temps! On y avait du plaisir, si.
Un jour, je suis partie.
Parlerons-nous encore de cuisine? oui, parce que j'avais apporté des assiettes de la maison, et j'ai appris à me servir des plaques électriques et à m'en dégoûter. J'avais un petit four aussi. Je l'aimais ce petit truc de 36 cm, avec la porte en verre et le gâteau qui colle aux résistances, mais comme j'ai été contente un jour, d'avoir une gazinière trouvée à Emmaüs. 
On a eu une cuisine immense, enfin, avec des placards immenses, c'est simple on y aurait tenu debout, tout s'y planquait. On était fiers d'avoir notre appart, avec des draps blancs qu'on avait punaisés aux murs pour cacher la tapisserie tellement elle était...
Il y a eu la plus belle, une jaune, jaune à Brest, c'est pour croire au soleil, et ça y faisait. Plein sud avec un toit terrasse. Bon, côté nord 70% d'humidité dans les murs, on a décollé tous nos meubles pour ne pas qu'ils moisissent. Mais la cuisine! On avait dégotté en trocante une table de bistrot des années 40, et les chaises idoines au dos rond qui se moule au tien. La vaisselle sur une étagère métallique blanche. A vue. Bordel à vue aussi. Mais peu importe. 
Un jour, on a eu notre appart, le vrai, celui où on peut percer les murs, voire en abattre. Chose faite. Gazinière qui ressemblait à une cadillac, en émail, superbe, vrai de vrai, une occas aussi, des boutons comme dans les films américains des 60's. Un capot. Et on a eu des placards, avec des portes qui claquent.
On est pas restés longtemps, juste quelques mois, et puis un travail. Qui nous apportait sécurité matérielle. On a loué. Vue sur le port. Au-dessus d'un bar. Oui, mais vue sur le port. Oui, mais au-dessus d'un bar.
On a trouvé le terrain et la suite, tu connais.
Pour dire que les cuisines,  j'en ai vu. J'y ai réfléchi. Je n'ai jamais voulu/pu/voulu qu'elle soit faite par quelqu'un d'autre. Quand on commence à bricoler, on sait le temps que prennent les choses et leur valeur réelle. On apprend. On s'améliore. On peut faire soi-même, sans que ce soit une trop grosse prise de risque. Alors, un jour, de mes petites mains j'ai monté des carreaux de plâtre pour poser un plan de travail de 3 mètres dessus. Et dessous, ça faisait étagère. 
Et maintenant, on reçoit du monde. Mon rideau étagère faisait minable. Les caisses derrières débordaient de tout, pas assez de place ma fille. 
Samedi, on a acheté des meubles en kit dans la maison suédoise, et là, c'est monté. Oui, tu lis bien, en deux jours, on a monté euh...quatre meubles tiroirs et six meubles suspendus. 
Au bout des mes pérégrination culinaires, j'en suis arrivée à considérer la cuisine comme la pièce à vivre de la maison. Maintenant, elle se confond totalement dans une unique pièce où on a le salon aussi. 
Ce n'est pas une cuisine. Enfin, si, parfois j'y fait les repas, souvent la boulange, les salades de fruits...
Mais, quand j'avais du monde à manger l'autre(s) jour(s), il n'y avait aucune rupture entre les plats et l'assiette, c'était facile. Aujourd'hui, j'ai des rangements en pagaille, mais surtout, j'avais envie qu'ils ne ressemblent pas à des meubles de cuisine. Je vais accrocher des photos. Décorer. Les enfants continueront leurs dessins sur la table et moi j'y poserai encore l'ordinateur. 
J'avais envie d'un foyer. 
Où je vois le feu dans la cheminée et les enfants lire. 
Où je regarde mes amis trinquer, et le plat mijoter.
Bienvenue.

Tiens, j'en rajoute une pour l'horizon de Lôlà :-)
Et je vois que nous allons ranger la bibliothèque et planquer la vieille TV. :-). 

9.6.11

Le Plein.


C'est ainsi.
L'hiver fut long. Le printemps précoce. Le ciel clément.
Soudain, la vie reprend. Elle arrive sans prévenir ou presque, il y a des prémices. Elle s'annonce. Et puis, un jour, elle déboule.
Des moments beaux comme s'il en pleuvait, de l'amitié à s'en nourrir, des plaisirs simples, le bonheur.
Le soir, tu te couches en te demandant si tu vas réussir à te lever le lendemain et tenir bon. Il se trouve que ces soirs-là, tu t'endors comme une souche (tu n'as plus l'âge de dormir comme un bébé) et le matin te trouve engourdie mais entière Agnès, alors, tu redémarres, aussi fiable qu'un diésel.


Tu simplifies à l'extrême. Tu abandonnes les gâteaux pour des salades de fruits, jolies, tu ne penses même plus à l'écran qu'un jour, tu sais bien, tu reverras, tu profites juste de ceux qui sont autour de toi.
La nuit, tu tentes de mémoriser avant de sombrer.
Tu essaies de faire beaucoup en peu. Les pauses sont courtes voire inexistantes, tu cours, parfois tu ferais deux trucs en même temps que ça ne te surprendrait pas.


Parfois, les imperfections. Tu en oublies même le dessert. Inconcevable. Et pourtant. Personne ne t'en veux. C'est de la bonne volonté en boite, ils te disent qu'ils sont contents. Toi aussi forcément.
Refaire connaissance. Se faire vouvoyer par un djeuns, mon dieu, mais serais-je donc vieille? Appelez moi madame, tant qu'à faire. Plaît-il?
Voir et manger avec 24 personnes en 6 jours, sans compter les enfants...11, ni les Zôtes, 10. Faire le plein. De tout et de riens. 
Se trouver sociable finalement. Aimer ça.
Et retrouver un soir son écran, dans un salon désert, et retenir des bribes d'instants passés, pour partager. 
Ne rien oublier. Juste, comme le bon vin, décanter. 



6.6.11

Un dimanche à l'Ouest.


 La veille, au crépuscule torride d'une journée brûlante, je mets la dernière touche au gâteau qui fait l'union de tous autour d'une table. Je suis dans un calme serein, les enfants dorment, l'homme travaille, j'entends les oiseaux qui chantent encore, tant que la lumière dure, ils jouent. J'aime faire ce gâteau, qui s'apparente à une construction, une pierre par ci, une autre par là. Et il détend.
Parce que cette fin de semaine a été dure. Façon de parler. Un premier repas autour d'une table ronde, mercredi, avec des amis comme on aime, dehors et dedans puisque c'est presque l'été.  Le lendemain, un dîner autour d'une table rectangulaire (ne devrait pas t-on dire "aurectangle"? ) avec des amis comme on aime encore, dans une maison neuve qui s'était mise sur son 31.
Vendredi soir, oh, si nous dînions chez nous, avec des amis qu'on aime, sur la terrasse à la lueur des bougies?

 (Oui, j'ai de l'or aussi dans une partie de ma vaisselle, et puis deux ou trois nappes blanches, c'est mon côté bourgeois )
Alors samedi soir, repos de fête, juste pour préparer celle du lendemain.
Je Lui ai dit, demain matin, s'il y a du vent, pourquoi n'irais-tu pas faire de la planche? Histoire de se détendre puisque je ne lui ai pas laissé l'occasion de penser qu'il pourrait faire le gâteau.
Il n'y a pas eu de vent, pourtant il l'a attendu un certain temps, dimanche.
La table des Zôtes desservie, j'ai mis la nôtre. 13 personnes, c'est un bon nombre malgré ce qu'on en dit, puisqu'en ajoutant deux tables en long, nous sommes tous bien assis. Grillades sous un ciel gris inutile puisqu'il n'a pas délivré de pluie. Et balade au bord de l'eau. Comme les couleurs étaient fades, le ciel gris c'est plat et terne, je me suis amusée à trafiquer les photos.
On a encore vu de beaux bateaux, ceux qui nous font encore rêver, un jour peut-être, ceux qu'on a même pas envie d'avoir parce qu'on sait ce qu'ils coûtent, et qu'on a pas besoin de ça pour être bien sur l'eau, ceux qui font sourire, quand on y sent le plaisir du propriétaire à le lustrer, le faire briller, ou bien parce qu'on se rappelle du nôtre, à l'école de voile, quand on prenait des cours ou qu'on en donnait, et puis les mini-croisières dans la rade.

Et puis, un port,  ce sont des engins étranges, qui roulent pour lever, et toutes sortes de bers, pour que le bateau à sec retrouve ses couleurs. 


C'est beau l'étrave d'un bateau, qui file sur l'eau bientôt.
Je ne suis pas bien sûre qu'on aie eu le droit de se promener là, mais j'ai vu des noms de bateau rigolo, de "Grenouille" à "Toubab", et "Volage".

Le Toubab a t-il été volage avec la grenouille?
Le tribunal nous le dira peut-être.


4.6.11

Chaleur


Les verres fumés œil-de-mouche me glissent sur les ailes du nez. La mouche a un terrain de décollage parfait pour aller se perdre dans les replis de ma chemisette longue, qui gonfle au vent comme un ballon, lourd et pesant.
Midi, je suis assis à l’ombre sur la terrasse, attendant de savoir si j’ai assez faim pour faire à manger.
Une heure. Je suis assise à l’ombre de la terrasse, bien que le soleil commence à me chauffer les orteils, et je suis bien incapable de boire un café. Je constate avec accablement que les plis de mon ventre sont emplis de cette eau salée qui extrude de mon corps mou, comme un début de fonte des matières organiques, je n’imagine même pas une seconde que ce puisse être ma graisse qui s’échappe ainsi.
Deux heures. J’ai du repassage à faire. Du facile, Dieu merci, car mon esprit ensuqué est incapable de réfléchir à la façon de placer une chemise avec pli dorsal sur une table placée dans une pièce où l’ombre…l’ombre ? N’a point. Il faut que je repasse les draps de la chambre, en chanvre, en lin aussi, et les taies. Je regarde tristement la vapeur chaude s ‘élever de la semelle qui ne glisse plus très bien, et je me souviens de mes jobs d’été à la blanchisserie, quand je me disais que jamais plus.
Trois heures, la chambre est faite. J’ai même fermé les rideaux pour empêcher les rayons sournois du soleil de pénétrer plus avant, et il se peut que la chambre soit la plus fraîche de la maison. Je lorgne langoureusement vers le rocking-chair Eames qui m’appelle, vient ! Assieds-toi et fini donc le livre sur la Cruche cassée, cette histoire de deuil et de femmes, qui te plait bien. Non. Demain, je fais le dessert, il faut le commencer maintenant.
Quatre heures. Ce soleil a séché le linge de la veille en moins de vingt minutes, je n’en reviens pas, mais ça m’arrange. Les tissus sont rêches et secs, ils sentent bons, ils se plient impeccablement, ce sera facile à repasser, oui ?
Mon fils court après les papillons, il a les joues rouges, je lui rappelle de remettre son chapeau et je l’oblige à boire un verre d’eau. Il me dit qu’il a faim.
Quatre heures et demie. Je soulage l’estomac de mon fils. Le chocolat, qu’il fasse chaud ou froid a toujours beaucoup de succès. La meringue du gâteau est au four. Non ce n’est pas une Pavlova, mais un Concorde. Donc, du chocolat.
Dix-sept heures. Allons-nous à la plage oui ou non ? Peut-être. Allez-y sans moi, j’attends les Hôtes. Et puis oserais-je avouer que la sortie à l’air libre de mon adiposité ne me tente guère.  Non bien sûr. Je me baignerai un jour où je serai seule. Je me souviens d’un jour de printemps où, avec mon amie, nous avions nagé entre les barques du petit port, un peu de vase entre les orteils, et une eau divinement tiède. Seul le bruit de nos voix, un oiseau peut-être, et le plic-ploc de nos mains qui jouaient sur l’eau étale…Te souviens-tu ?
Dix-huit heures. Ils sont dans l’eau. Je les regarde, leur bonheur surtout, et enfin je sens le vent qui soulève mes jupons et l’étoffe de ma chemise. Je sèche.
Ce soir, nous mangerons dehors. 


2.6.11

Bretagne For Ever...


J'ai pris la moto, j'ai roulé. J'avais le but d'aller au bord de l'eau, là où les gros bateaux. Les grands. Ceux qui vont loin. Là aussi où le collier de perles et les carrés Hermès se frottent aux bottes de caoutchouc et à la barbe de trois jours. Contrastes amusants. Richesses différentes. Celle de l'apparence, celle de la liberté. 
J'ai dépassé l'eau, passé le pont en travaux, et par hasard, je suis tombée sur une très jolie, mignonne chapelle, ouverte, quelle chance.
J'aime quand l'impromptu rencontre le beau. Que le soleil fasse une lumière bleu et rouge. Que l'air soit salé. Et que claquent les drisses. 






See you later...