30.11.11

Maison

Logis, abri, toit, cocon, chez-soi.
C'est l'hiver.
Pas encore, en fait, même qu'une agapanthe me fait une fleur, mais quand même, le matin il y a l'envie de mettre un pull supplémentaire, ou de faire un feu.
Sortir de chez soi, prendre un peu de bois, avec les bottes que tu ne fermes pas, rentrer en claquant des dents, car dehors il fait bien plus frais que dedans. Et puis le gris.
Allumer un feu, voir les flammes lécher la vitre, avoir chaud rien que d'avoir ramassé le bois.
Et ailleurs, y en a qui sont dehors même la nuit.
C'est quoi une maison pour toi?
Un condensé de ta personne? de tes goûts? une collection de tes souvenirs? toute ta vie en un lieu? un endroit où tu n'es jamais? qui n'a pas d'importance? l'endroit où tu travailles? juste un toit?
Pusiqu'ici c'est "moi je", je vais te donner ma version.
Ma maison, celle où je vis, celle que j'ai la chance de pouvoir acheter à ma banque pour encore un bout de temps, celle qui est le lieu où vivent ceux que j'aime.
C'est mon foyer.
Alors, c'est hétéroclite un peu. C'est de plus en plus "nous".
Au début, on avait les meubles de récup. Ceux des parents, ceux d'Emmaüs, un minimum. On s'en contentait. Ils remplissaient leur fonction.
A partir de quand et pourquoi on a eu envie de changer? A partir de quand et pourquoi on a décidé qu'on préfère garder une vieille voiture pour s'acheter un fauteuil.
On a pas la clim, mais on a un canapé.
Tout ici a été choisi à deux. Ce sont de choix dont on a discuté, qui sont parfois un compromis, souvent un accord absolu. C'est aussi pour ça que mon bureau, ma pièce ne ressemble pas au reste d'ailleurs. Le seul point commun étant le bazar.
L'autre jour je disais à un ami qu'on avait de beaux meubles. Qu'est ce qui m'a pris de dire ça? ce sont des beaux meubles pour moi, parce que esthétiquement ils me plaisent (d'autres les trouvent moches), je les aime, mais ils ne valent rien en dehors de la conscience aiguë que j'ai d'avoir une chance folle.
Parce que je suis à l'abri du froid.
Ils ne valent rien contre la possibilité d'aller chaque jour faire un tour à la mer.
Et de pouvoir rentrer faire un thé, ou un café.
Je m'en suis voulue de dire ça. Quelle prétention! Je t'en foutrais des beaux meubles!
Je m'assois dans la cuisine, le jardin est sous un rayon de soleil hivernal, il brille.
J'ai. Je possède, la belle affaire! Je suis presque propriétaire. Je mange tous les jours.
Mais qu'est ce que ce serait si j'étais seule à en profiter?
Est-ce que j'étais moins heureuse avant assise dans mes fauteuils pourris? Ou bien dans un salon fait de bric et de broc? Je sais bien que non. Je m'embourgeoise, je me bobo-ïse.
Mais même si une légère culpabilité me traverse quand je pense aux autres, j'assume aussi, parce qu'on a fait des choix. On ne part pas en vacances (c'est en passe de devenir un mensonge, ça, puisqu'on est en train de s'en organiser), on se serre la ceinture, et puis on a "hérité", aussi.
On a des fauteuils, c'est pour que les amis s'y posent. On a un toit, il faut se battre pour le garder, on a toujours cette angoisse.
On a une maison, un toit, un abri, un chez-nous.
J'aurais voulu ne pas avoir à me poser ces questions. Que tout le monde puisse avoir un toit me semble évident. C'est la trêve hivernale, un minimum quoi.
Et peu importent les meubles, une chaise pour prendre un café avec quelqu'un avec qui on passerait des heures à causer, c'est ça l'essentiel.

et puis tu vois bien le bordelum là? 

29.11.11

Danse # énième

Voilà.
Le soir, je roule dans la nuit, à la lueur de mes phares et des lumières de la ville.
Trouver une place pour la voiture. Passer la porte de la MAL. Retrouver ses copines"bonjouuuur" se faire la bise. Alors comment tu vas?
Porter un pantalon fluide et deux T-shirt. Pour pouvoir en enlever un peut-être.
Echauffement, le dos surtout, à la barre. Et puis les pas, pour chauffer le muscle, le coeur.
Elle avait de l'énergie Ondine hier, on a suivi. Echauffement essoufflant, en 15 minutes déjà transpirer. Enlever un T-shirt. Se retrouver en débardeur, ouvrir les fenêtres à la nuit douce encore.
Faire des pas, se planter, recommencer, suer, recommencer, réussir un peu. Se libérer.
C'est ça la danse africaine. Délier. Détacher. Défaire les noeuds. Retrouver les sensations oubliées.
Ouvrir en grand les bras, sauter haut, sauter bas, frapper des mains, sautiller, se poser léger peut-être. Rire.
Boire de l'eau, décomposer le geste, le retenir, l'oublier.
Tenter de courir la chorégraphie. Se mouiller, se tromper, tourner à droite au lieu d'à gauche, soupirer.
Etirements. S'allonger. Respirer par le ventre. Fermer les yeux. Se détendre. Sentir chaque partie de soi, contre le sol dur, s'élever pour toucher le ciel, souffler en touchant terre.
Etre bien. Etre vivant.
Rentrer. Le corps tout coton.
Les lumières de la ville, le noir de la campagne.
Voir l'étendue d'eau sous la lumière des étoiles.
S'endormir, lourd, s'endormir, plaquée au matelas, comme un corps dense qui danse.

27.11.11

L'oiseau sans "tu" for Jack.

C'était hier, ou avant-hier. C'était un jour comme un autre, dans ce paysage qui m'est familier, qui n'est jamais tout à fait le même ni tout à fait un autre.
C'est le matin. C'est toujours mieux de raconter une histoire du matin, on a de l'espoir sur le reste de la journée. Et puis le matin, il y a la lumière.
C'était un matin, il n'y a pas bien longtemps.
Le soleil avait peine à ouvrir les yeux, parce que la brume lui faisait comme un manteau d'organza. L'organza c'est beau, on en fait des robes de mariée, pour le jour le plus beau. Il paraît.
Alors, ce matin là, le ciel scintillait d'un soleil organza.
Et puis la mer.
La mer, elle est partout pareille, une formule d'eau et de sel, un peu plus d'eau, un peu moins de sel, que sais-je, parce qu'ici, c'est la mer, mais pas tout à fait. Il y a de la rivière dedans. Cette eau qui vient de loin qui descend des montagnes, qui longe la terre, qui se marie au sable, qui entraîne les graviers pour en faire une poudre dorée.
L'eau, un peu douce un peu salée, jamais amère, est de soie tissée sous le vent irisé. Pas une vague, pas un blanc d'écume, pas un souffle, pas un regard de regret vers le ciel calmé.
Sur la mer, un peu de relief. L'eau qui descend soumet à nos yeux encore innocents, le travail des hommes. Ces tables qui s'étirent à n'en plus finir, qui épousent les méandres avec leurs parallèles régulières, ces bâtons noirs non rompus de fatigue mais juste bavards de situer les parcs, comme si de les voir allait limiter le temps, comme si chaque barre était la mesure à quatre temps, tac tac tac tac, la musique que voilà.
Ce matin-là, ce ciel de soie, cette eau vibrante et les portées musicales, forment la partition d'un jour serein.
Un oiseau est posé sur la portée du Sol, il forme une croche, dont la hampe est le cou, et le crochet le long bec. Il va chanter sans doute?
La note est tranquille, elle ne se déplace pas, elle réfléchit. Me laissera t-elle approcher, me laissera t-elle l'admirer?
En contre-jour sur la deuxième ligne, la note se tait.
Plus loin là-bas, le chaland brille d'une lueur douce, je vais y monter, l'eau est déjà à mi-cuisse, nous y sommes presque.
L'oiseau reste sur sa portée, muet.
La clé du moteur cliquette, et le rugissement éteint un instant la paix du moment. L'oiseau n'est plus là.
Il s'est envolé, je le vois dans le ciel encore rose, je l'espère non loin de mes yeux quand il se pose. L'oiseau nous suit.
Il ne faut pas que je l'oublie : sur cette mer, sur cette rivière, sur cette eau nourricière, il est chez lui. C'est moi qui suis de passage, c'est lui mon guide.
Il s'est rapproché. Assez pour que je remarque ses pattes. Ses pieds. Des mains gantées de jaunes, à trois ou quatre doigts, avec le petit ourlet qui termine le gant, juste au début de la tige de sa jambe. J'admire et je devine sa dextérité à se déplacer sur les tables-portées, aux fines lignes de fer rouillé.
Son cou s'étire ou se plie, semblable aux méandres de l'endroit, sa plume lui fait une coiffure de roi, distingué comme un coq de basse-cour de haute tenue.
Soudain, il s'envole à nouveau et je devine l'appui de ses ailes sur l'azur, et j'entends le bruit de ses voiles puissantes, comme un battement de coeur.
C'est un oiseau de mer, ou bien de terre, c'est un oiseau chez lui, de par-ici.
Cui-cui.



L'oiseau des mers

Perché sur tes hautes pattes aux doigts gantés de jaune, tu te détaches du ciel bleu, oiseau gracieux.
Tu promènes ton bec allongé et fin, dans l'air marin qui est le tien.
Ici, tu es chez toi.
La plume qui souligne les mouvements de ton cou s'étire, fine.
Ton oeil noir ne rate rien, d'ailleurs quand je m'approche, mine de rien, tu t'envoles.
Alors, ton cou se plie, il forme une anse qui ressemble aux méandres de ta rivière, et tes ailes se déploient comme deux voiles immenses.
Je vois bien que tu t'appuies sur l'azur qui t'emmène au loin. J'entends presque le bruit de l'air qui se faufile entre tes plumes, le battement de ton coeur.
Je vole ton image floue comme un fantôme, jamais tu ne seras prisonnier de ma boite noire, espoir.
Peut-être qu'un matin, alors que t'éveilleras d'un sommeil furtif, je serais là et cette fois, tu me laisseras le temps. Tu te feras beau, tu lisseras tes plumes, et de ton regard de coté tu cligneras de l'oeil pour me dire, tu vois, un peu de patience...

25.11.11

125

Ce ne sont que des chiffres.
Et les chiffres et moi  ne font pas bon ménage.
Il aurait fallu dire, moto.
Alors disons-le : moto.
Mais d'aucun dirons avec justesse qu'une 125 ce n'est pas vraiment une moto. C'est sûr, les 125 il y en a de toute sorte.
Au départ, pour moi, c'était celle de Julie Wood qui s'entraîne sur le terrain de cross pas loin de chez elle.
Et puis ce fut le bruit de celles qui passaient en hurlant dans le chemin creux derrière chez moi.
Une 125, c'était nuisance.
Mais vois-tu, elle a un avantage énorme. Elle ne nécessite pas les 2000€ minimum d'un permis moto.
Alors un jour, j'ai vu une 125 qui avait tout d'une grande.
Une petite, fine, à ma taille, noire, brillante, avec des chromes et surtout le phare avant rond.
Je me serais prise pour Yoko Tsuno, pour un peu.
J'en ai fait quelques 3000 km, petit à petit, juste les jours de soleil, pas forcément de chaleur, mais jours secs.
Et puis en avril, mon genou m'a réduite à pas grand chose. Mon intégrité était touchée, je ne me sentais plus capable et de toute façon, je souffrais de passer à califourchon sur la selle noire de mon engin.
Nous en sommes en novembre.
La batterie était à plat, bien sûr.
Hier je suis allée la recharger. Ce soir je l'ai remise dans son espace, deux tours de vis, fermer le cache avec un quart de tour de clé et le petit ergot enclenché.
Il faisait encore doux vers 17H30. Le soleil commençait de descendre un ciel serein.
J'ai retrouvé mon casque, mes gants. Comme neufs.
Je n'ai pas mis de sur-couche de vêtement, je n'ai pas changé de bottes, je peux en faire avec mes talons maintenant. Des petits.
Contact.
Accélération.
Vibration.
Mon coeur bat.
Passer la vitesse.
Tourner la poignée droite. Clignotant gauche. Clic-clac, je suis partie.
Accélération.
Vitesse.
Accélération.
Plus vite.
J'ai le vent qui bat le bas du jean.
J'ai de l'air qui filtre entre le col de ma veste et la mentonnière du casque.
Je sens mes joues s'échauffer.
90.
Juste bien.
Courbe, ralentir, repartir de plus belle.
Excitation.
Rentrer 20 mn plus tard.
Voir le ciel rougir de mon plaisir.




24.11.11

Matin calme



C'est ce titre que porte l'album.
Rien à voir avec le Japon, pays du matin calme (ou bien c'est la Chine? ) ( ah ben non, c'est la Corée, et du coup ça me paraît moins calme) 
On va dire que le pays du matin calme c'était l'Istrec et la pointe du même nom, ce matin. 
Une fois les bruits du moteur, ou du tapis, ou de l'ensacheuse, éteins bien sûr. Ou les avions de chasse passés. 
Deux chalands sortis, peut-être qu'il y en a un supplémentaire pour promener ma petite personne, ou peut-être que la place est limitée sur le pont. C'est vrai qu'entre les caisses (?) les balises, les poches pleines, le râteau et la fourche, le treuil en plein milieu, la drague et toutes les chaines et câbles afférents, ça t'en laisse pas trop, de la place.
Mais.
Les couleurs. Les caisses sont d'un plastique seyant dans la lumière douce du matin. Un joli rouge un peu passé, un vert, passé aussi, le gris du chaland qui reflète la lueur du soleil qui filtre dans la brume, du mauve encore, le vert des algues translucides, l'eau claire, on y voit les Sargasses qui ne devraient plus y être en cette saison...
Descendre dans l'eau, protégée par les cuissardes, cette fois à ma taille, marcher le long des tables, regarder les mains faire, retourner les poches (c'est pour nettoyer, enlever les algues et les bestioles qui se collent à la poche et pourraient empêcher le développement de l'huître), voir les différentes techniques pour le même travail, en rire avec eux, et contempler.
Un héron cendré déploie ses ailes, une mouette survole un goéland.
Il faisait beau.
En continuant le balisage des parcs commencé quelques jours avant (il faut un coefficient de marée assez fort pour que l'eau se retire suffisamment), remonter le chenal vers un banc de sable en amont où des pêcheurs à pieds partent aux rigadots peut-être à la palourde why not, et penser à Turner.
Ce fabuleux tableau de Turner, noyé dans la lumière d'une pêche sur le sable d'une plage, avec un soleil orange qui irradie les personnages ployés dans l'effort. Ce matin, j'ai vu le tableau devant mes yeux.
Ou presque.
Le chaland se déplace avec les mains de Jean-Noël, qui le tire à son pas, sans un bruit, sans écume, avec juste une légère ride soyeuse de l'eau claire, il glisse.
Le bruit du moteur et c'était le vent fais sur le visage. Voir la côte se déplacer, ne rien reconnaître vraiment, ou plutôt commencer à se repérer. Il me dit que parfois il vient travailler de nuit quand il a des commandes importantes, pour avancer le travail à terre. Je n'imagine pas la nuit. Il connaît ses parcs, ses carrés comme sa poche, mais quand même....C'est la marée qui commande.
On remonte plus loin que nécessaire au-delà de la langue de sable. Je vois les pêcheurs de Turner et j'ai envie de faire nanana-nanèreu, tellement je suis bien sur l'eau. Autant Turner soient-ils, je préfère ma place à la leur.
Tellement j'ai de la chance.





Giron

On s'est peut-être fâchés aujourd'hui, je t'ai peut-être enjoins de ranger ta chambre, même si elle est souvent bien mieux rangée que les autres, de toute façon, tu descends tous tes jouets au salon.
Tu as peut-être déjà pleuré une fois, ou alors tu t'es donné des coups sur la tête parce que tu n'as pas réussi un dessin, à tes yeux, ou bien parce que d'un geste un peu trop brutal, tu as fait tomber ta soeur.
Sans doute que tu as fait le clown à table, que tu as éclaté d'un rire si communicatif qu'on en peut plus de manger, et tes soeurs bon public, n'ont pas encore fini de rire. Eventuellement, tu as déjà été à table, devant ta feuille, tu tirais la langue, concentré sur un cheval, ou un requin ou un oiseau multicolore, ou autre.
Tu as avalé une pièce de 10 centimes et tout va bien merci.
Moi, je sors de la salle de bain, et soudain tu t'avances vers moi, le pouce en bouche, et tu t'appuies sur mon giron.
Je suis dans un couloir, et tout à coup, tu t'accroches à ma hanche.
Je suis sur le canapé avec Linley, ou Roth, ou Rabhi, et tu passes tes bras autour de mon cou.
Ta tête m'arrive au plexus, alors qu'hier je te tenais dans une main.
Tu dis non, avec des sourires, tu es vif, vite en colère contre toi, ou contre l'échec, tu lis, tu écris, tu fais des jeux de mots, tu es si grand.
Fiston.

23.11.11

Toile d'araignée.


C'est un trajet banal, un de ceux que tu fais les yeux fermés, plusieurs fois par semaine, plusieurs fois par jour. 
Parfois, tu as la voiture qui te fait les bras musclés, la conduite spaghetti n'existait pas dans l'temps, parfois tu as la familiale, où tu pouvais caser un landau, une poussette, une baignoire, un vélo, une valise et 5 personnes. 
La petite voiture a un avantage sur la grande : la radio fonctionne encore. Elle puis elle a une pêche, je te raconte pas. 
Bref, je voulais parler de la radio, parce qu'en voiture la radio c'est particulier. C'est pas forcément celle que tu écoutes à la maison. A la maison, ce sont les émissions où ça cause bien, où tu peux t'interrompre pour écouter encore mieux. 
Ecouter la radio en voiture la nuit, j'aime. J'ai déjà dû en parler quelque part de ça, cette sensation d'être dans une bulle, avec les lumières du tableau de bord, la voix de l'animateur/trice qui ne parle rien qu'à toi, et les étoiles ou la lune à l'ouest. Tu reviens d'un ou deux jours passés en famille, tout le monde dort et toi tu es ailleurs, au volant mais ailleurs.
Mais en journée, parfois, les trajets sont trop courts pour suivre l'intégralité d'une émission, alors je varie mes choix.
Comme tout à l'heure. C'était mon quatrième trajet de l'après-midi. On est pas écolo le mercredi, pas du tout. Quelque fois je parviens à faire une moitié de courses entre deux activités enfantines, mais bien souvent, pas le temps, je reste scotchée avec mon caddie à la caisse, et je suis en retard pour récupérer ou l'un ou l'autre. 
Tout à l'heure, il faisait beau. 
Il y avait un feu. Un feu rouge. Ici, c'est pas fréquent les feux, je me demande si ce n'est pas le seul de la ville. J'attendais sagement dans ma bombinette de voiture, la radio branchée sur je ne sais plus quelle fréquence, je hais tellement les pubs que je change souvent. 
Il fait tiède dans l'habitacle, je n'ai pas ma veste, juste un pull, mes sun-glasses, ouais, et la musique, tout à coup. Je ne me suis méfiée de rien. Tu vois, j'attendais, juste mes mains sur le volant, mes pensées vaguement maritimes, vaguement impatiente, vaguement vague à l'âme. Une proie facile. 
Pas vraiment de la musique si on est puriste, mais une mélodie. Une de ces chansons qui reste en tête des heures. Les chansons dont tu n'achètes pas le CD mais que tu peux hurler dans la voiture, quand t'es toute seule. Stevie Wonder, tu vois. Enfin, tu entends? I just called to say I love you...
On est sur la plage. C'est l'été, comme toute l'année, il n'y a pas vraiment de saison, il fait beau 360 jours par an ou presque, le sable est blanc et fin, et l'eau émeraude. On est dans une pièce surchauffée par les couples qui dansent. C'est un slow, un slow langoureux, mon dieu cette musique, et tu me serres contre toi, j'ai 14 ans à peine et tu es beau, brun, de la peau jusqu'aux cheveux, tu t'appelles Karim. C'est l'île Maurice, peut-être après la journée sur l'île aux Cerfs, le paradis comme on se l'imagine. Tu jouais, je jouais, j'apprenais, parade.
Je t'avais oublié figure toi. La mémoire peut jouer des tours parfois, mais la musique est un piège à souvenirs. Elle se fige en une toile d'araignée vorace, elle mange ses proies et peut mettre des années à digérer. Et soudain tu me reviens au visage, pas un trait de toi n'est estompé, c'est comme si tu étais là. Je n'étais pas amoureuse de toi, mais de ton copain. Celui qui avait les yeux bridés. Si longtemps. 
Le feu passe au vert, j'ai eu le temps d'avoir des frissons et presque les larmes aux yeux.
Mais heureusement il fait beau, alors je porte mes lunettes noires. 
Je continuerai de me cacher. 


Musique de circonstance

22.11.11

Orage

Nous nous regardons. Les mots se sont tus, le temps d'un éclair.
Nous regardons dehors. Il pleut. Nous n'entendons pas le grondement de l'orage, car dans la pièce, le radiateur émet un raffut de tous les diables. C'est le combat du Bon Dieu contre les Enfers. La réunion se poursuit, joyeuse, même si dehors c'est le déluge.
J'aime les orages.
Il fait nuit et en un demi-quart de fraction de seconde, il fait jour. Le paysage se reflète dans notre oeil comme un flash, nous pourrions distinguer le moindre détail si nous savions où regarder exactement.
Il n'est pas fréquent que l'orage dure si longtemps. Plusieurs heures. Aux infos ils diront que Quiberon a connu des inondations.
Après être rentrée (tard dans la nuit pleine de fantômes), j'ai lu. Entre Pierre Rabhi et Linley, mon coeur balançait.
Je me disais que la nuit ne serait pas entière, parce que le bruit allait forcément réveiller l'un des miens.
J'aime les orages.
Parfois, je voyais l'eucalyptus se découper distinctement sur le ciel blanc laiteux. Inconsciemment, alors que mon index se préparait à tourner une page, que mes yeux suivait la ligne, et encore, et encore, je comptais. Un, 2, 3, ... , 12. L'orage est loin, me disais-je alors que Linley se frayait un chemin avec sa Healey Elliot dans la circulation londonienne. Il fallait que je revienne en arrière, mon esprit n'étant pas fichu de se souvenir pourquoi Linley était parti faire un tour.
J'ai éteint.
Dans le vélux, je n'étais embêtée par aucune lune, les orages ont comme avantage de transporter tout un tas de nuages qui fait un rideau occultant adéquat. Comme le grondement d'une mer dans le lointain, le tumulte des vents me berçait.
Rien à fiche des états d'âme de Linley, j'ai fini par écouter "Partir avec" Marie-Pierre Planchon, mais je ne me souviens plus où, ni avec qui.
Je me suis endormie.
J'aime les orages.
Ce matin, j'avais l'oeil frais, le pied alerte, l'homme n'en a pas cru ses yeux quand il m'a vue descendre prendre un café avant 7 heures.
Ça fait du bien de dormir.

Raaaaah les castagnettes! écoute ça d'urgence!  (merci Alabamamonamour ;), je retrouve grâce à toi la musique que j'ai adoré dans un film "tous les soleils" film que j'avais aimé d'ailleurs)

19.11.11

Retourner à l'école

Je deviens une pro pour ce qui concerne les politiques de l'habitat.
Sans doute qu'un jour je finirai par deviner ce qui se cache derrière.
Les opérations financières rentables, les fonctionnements qui permettent de payer moins d'impôts, et profiter de l'Etat, service public en veux-tu en voilà mais chacun pour soi surtout, ne soyons pas fou. Mais pour le moment je suis naïve, je fais semblant de croire ce qu'on me dit.
Et puis maintenant, je sais que les darts sont des fléchettes électroniques, ça t'en bouche un coin? moi aussi!
Mais le plus important, c'est que je me suis mouillée.
Ouais.
J'ai trempé mon fondement dans l'eau de mer, alors que je voulais tout savoir sur l'huître.

J'aime pas encore l'huître. Je dis pas encore, parce qu'à force, je vais finir par goûter ce truc qui jusqu'alors me rebutait. Mais maintenant que j'aime les épinards, pourquoi pas l'huître.
Bref.
J'ai sauvé de la noyade mon appareil, je me suis assise sur mes cuissardes, pointure deux fois plus que la mienne, mais mes chaussettes avaient glissé au bout, j'étais presque à l'aise. Et puis j'ai failli avoir un fou rire. Tu vois la scène, la minette qui bascule en arrière, un pied de trop dans la vase, en poussant un petit oOOh, surpris, et les gros bras qui me sauvent de là, je peux te dire que j'ai pas bougé du chaland après.
Ouf ceci dit, le photographe de l'AFP qui était présent, a eu aussi besoin des gros bras, non mais.
La vase est un vrai piège.
Le soir, je me suis posée dans le canapé, je crois que j'ai tenu 5 minutes avant de piquer du nez.
N'empêche, j'ai passé une super journée avec un super bonhomme et des supers gens. Ça paraît bête ce que je dis, mais vraiment, cette entreprise là, parce qu'il faut bien reconnaître qu'il ne correspond pas au modèle standard de l'ostréiculteur, a quelque chose que les autres n'ont pas. Une générosité, un accueil incroyable, jamais fâchés des questions en plein travail, jamais de remarque sur lesdites questions sans doute débiles parfois, juste sympas, souriants même après avoir porté je ne sais combien de paniers de 15 kg. Ce sont des filles aussi hein. Des minettes.

Ben elles tapent sur les huîtres de roche comme des chefs, elles te les séparent en deux, en trois, avec leurs petits bras, en chantant sur le transistor musique 80's, voire même en se dandinant, et en se marrant.
Ecole de vie, moi je dis.
Chapeau Isabelle, Véronique, Kathleen, Emerson, Jacques et Jean-Noël. Ouais.

Mes différents articles sur l'ostréiculture LA

16.11.11

Connexion


Il était tout trouvé ce titre.
J'ai récupéré une connexion.

Tu vas te demander ce que j'ai pu fiche loin du net moi qui y suis accrochée comme une huître.
Tu auras bien raison.
J'ai connecté aux gens.

Je me suis imprégnée.
J'ai pris mon temps.
Il va d'ailleurs me falloir un certain temps de digestion. De gestation.

Quand je lis un texte, il résonne ou pas en moi. Il m'interpelle. J'accuse le coup ou bien il m'indiffère. Je peux choisir de fermer le capot comme un clapet. Je peux gérer mon émotion en fermant les yeux et en disant non.
Mais les humains.
Ils ont une voix. Ils ont un timbre. Ils ont une odeur. Une histoire.
Et parfois c'est une sacré histoire.

Alors, pendant que je me trouvais loin du monde, j'écoutais. Je regardais. Je m'impliquais presque sans le savoir, sans le vouloir, c'était comme ça, comme de croquer dans un gâteau de beurre.
J'ai admiré. J'admire.
J'ai l'impression de mener une nouvelle vie, près des gens, d'être en écho.
Il faut que ce soit vrai. Il ne faut pas jouer.
Il faut vivre.

7.11.11

vue


Ceci est une vue.
De salle de bain.
La même du bureau.
C'est pratique d'habiter en haut.

5.11.11

Couleurs

Aujourd'hui j'ai appris qu'on ne mettait pas de point dans un titre.
Et puis, en cherchant une forêt aux couleurs de l'automne comme il peut y en avoir dans certaines magnifiques régions de France, j'ai trouvé les couleurs de l'automne dans le ciel. Et ça m'a plu.







En plus, on pouvait décrocher la lune.
Lundi, vivement lundi, c'est danse africaine.
Lundi, vivement lundi, je vais peut-être aller sur l'eau. Je voudrais prendre en photo les mains, les visages, les bateaux, la côte... Nous verrons.
Pour ces photos, je vous conseille de cliquer dessus. Un beau fond noir et vous verrez plus clair.

3.11.11

Le coeur qui fuit.

Elle a le coeur qui fuit.
On lui a dit ça comme ça, alors que c'est à son genou qu'elle voulait qu'on parle.
Elle a le coeur qui fuit, mais elle n'est pas plus étonnée que ça, on le lui a déjà dit ça, y a peut-être bien plus de vingt ans.
C'était l'époque où elle avait aussi le coeur d'artichaut. Un coeur qui fuit et un coeur d'artichaut c'est pareil au fond, se dit-elle. Puis c'est pas grave. Elle sait bien qu'on naît avec un capital de battements de coeur. C'est comme les piles, ça ne s'use que si l'on s'en sert.
Enfin un grand mystère résolu :
Elle a le coeur qui fuit et c'est pour ça qu'elle aime.


2.11.11

Poète pouêt.


Je cherchais l'or de l'automne, je cherchais l'arbre.
Je cherchais l'ombre de la nuit, je cherchais ton âme.
Je cherchais quelqu'un, un passant ou toi,
Je cherchais où et vers quoi?


Il y avait la lumière du soir,
Il y avait l'ombre d'un espoir.
Il y avait la branche d'un saule
Il y avait les reflets de l'onde.


J'ai trouvé une porte, j'ai suivi un chemin
J'ai trouvé une feuille, j'ai lâché ta main
J'ai trouvé un abri, jusqu'au lendemain.
J'ai trouvé que sans toi, c'était pire que ça.



Alors j'ai roulé le métal
Alors j'ai cassé le pavé
Alors j'ai peint des montagnes
Alors j'ai craint la castagne.

Et de toi, j'ai gardé l'automne de la nuit.
Et d'un toit, j'ai fait mon abri.

Bon, ça casse pas trois pattes à un canard, mais je voulais accompagner mes pics. :-)