28.11.10

La Plaine



J'ai rêvé.
Je ne sais plus bien si j'étais endormie, un peu moins que le chat sur mon ventre, au coin du feu et du canapé gris, ou bien sous la chaleur bariolée de mon oreiller.
Je dormais.
J'ai vu cette route, ce lacet clair, se faufiler sur la plaine. La lumière qui frappait de beauté les vignes, le marron et le vert, et l'ombre d'une voiture qui te fait réaliser la grandeur de l'espace.
Il faisait beau ce jour là.
Un jour de ces vacances inoubliables, celles qui m'avaient fait revenir chez moi, un temps. Nous avions une ridicule petite, toute petite voiture, le siège bébé seul passager possible, petite voiture légère pour monter les cols, tourner les épingles à cheveux, pour accéder là-haut.
Je tenais le volant. J'y tenais. Ma route, comme si moi seule devait la tracer. Pélerinage des souvenirs.
Dans mon rêve j'étais seule.
Au coin d'un feu, d'une rue, celle qui te fait rencontrer le vent en pleine face alors que tu tournes à l'angle de ta rue.
J'ai vu ce sentier tracé au milieu de quelques arbres éparpillés, égrenés par une main aimable, oubliés par le vigneron, heureux homme.
La plaine est brune, rouge, ocre, noire, brûlante du soleil du matin, qui n'était encore rien. Nous roulons. Muets. Ecrasés par la grandeur de cette route 66 en plein milieu d'une île. Un désert de sable. Nous savons que c'est exceptionnel. Le temps bleu. La route. Le sable. J'étais loin de penser qu'il y aurait du vent sur cette plaine. Ni celui d'un pont, ni celui d'un bord de mer. Là, nous étions dans le coeur de la Fournaise, si proche. Nous rentrerions, huit heures plus tard, après avoir descendu la caldéra, atteint le sommet, fait son tour. Rouges écarlates, alors que le vent frais nous avait fait oublier le danger du soleil à plus de deux mille mètres d'altitudes, sous les tropiques.
Je vois cette image d'une plaine, dans mon rêve, une plaine métropolitaine,(au fond je crois bien que j'avais la chaleur du chat sur mon giron), et, tu ne sais pas, mais dans mon esprit, il n'y a pas de doute qu'elle se confond avec la plaine des Sables. Si loin, si proche.
J'ai rêvé, sans doute, mais c'est comme si c'était vrai.
C'est quand le chat est parti, que je l'ai su.


26.11.10

Le Pont Lorois.

C'est un commentateur anonyme ce midi, qui a fait que j'ai visionné cette vidéo que j'avais faite un jour où j'étais déjà un peu folle.
Ce billet date de mai 2008, un siècle en somme.
Je viens de retrouver mon camescope, il est actuellement en charge.
Ce Pont est de mes favoris. Il va d'un endroit que j'aime à un autre endroit que j'aime, il surplombe cette merveilleuse Ria d'Etel qui change tous les jours d'aspect et de couleur.
Aujourd'hui, j'aurais la tentation de filmer de ma moto, mais crois bien que je n'en ferai rien, bien trop dangereux. Si je lâchais la caméra tu te rends compte?
Tiens, regarde, avec un peu de chance tu ne l'as pas encore vue, et tu aimeras.
J'espère (même si l'animateur radio t'agaces un tantinet).

21.11.10

Réconciliation


Huelgoat, le Chaos.

Vois.
Le ciel se reflète dans le verre de la table basse. J'y vois du bleu et du blanc.
Le poêle est chaud, il diffuse juste ce qu'il faut.
L'une dort, les deux autres lisent sur le canapé. L'homme, corrige.
Il y a la lumière du soleil sur le mur framboise, cette même lumière d'hiver que nous avions hier au-dessus du chaos rocheux d'Huelgoat.

(ménage de la vierge)

C'est étrange cette envie que j'ai depuis quelques temps de dire et montrer aux enfants les lieux que j'aime. Ils ont grandi, ils aiment voir, admirer, il en faut peu pour qu'ils soient épatés.
Voir et marcher sur d'aussi gros éboulis, à leur taille, a de quoi leur laisser des souvenirs.
Et puis, c'est comme si tu étais là. C'est facile d'imaginer que mes yeux voient et que tu vois derrière eux.

Eglise Notre Dame de Rumengol (Le Faou)

Les églises bretonnes, riches, baroques quasiment avec tout cet or qui déborde de l'amour des paroissiens pour leur dieu. Y croire ou pas, peu importe, lieu de culte, lieu curieux pour les profanes, qu'on ne sait lire qu'avec un guide ou une connaissance que je n'ai pas. Se sentir bien dans le calme de la nef, oser franchir le choeur pour y photographier la Cène. 

Ne pas oser plus, alors que chaque travail du bois est remarquable, quand tu réalises les détails, que tu ressens l'envie que l'artisan avait de faire correctement les choses, pour qu'elles passent le temps, les siècles.

Cygne, le coeur.
Et puis, ce cygne. 
A la blancheur translucide qui m'a rappelé une autre transparence. Avec une lumière adéquate, la luminosité de ses plumes blanches, pures, c'est banal un cygne, mais c'est comme un coucher de soleil, c'est un banal beau dont je ne me lasse pas.
Il est donc des jours, des heures, où le repos. 
Il est un temps qui s'accorde à l'humeur, doux, bleu, à la lueur douce d'un soleil hivernal, qui sublime la cime des arbres, flamboyants d'automne. 
Prendre ces moments comme prendre des forces, pour l'après. 

19.11.10

La Courge?


J'ai plein de choses à dire. De ces choses que l'on ne dévoile ni sur un blog ni sur aucun réseaux sociaux qui ne sont sociaux que d'apparence. N'oublions pas qu'un salarié s'est fait viré d'avoir laisser sa langue fourcher, en public s'il vous plaît, car chacun sait qu'internet n'a d'intime que les mots que tu glisses. 
Malheur à toi d'en dire trop!
Je tairai donc.
Je vais te parler de la pluie et du beau temps?
Tu connais? 
C'est vrai quoi, c'est un sujet essentiel, qui n'engage à rien. C'est la phrase que tu lances pour éviter un blanc,  parce que tu ne connais pas assez la personne en face pour laisser le blanc, le silence bruyant, les non-dits, s'installer
Les blancs. Ils te donnent le degré d'intimité avec ton interlocuteur. 
Il y a des blancs lumineux et des blancs violents. Des blancs sages et des blancs cassés.
La page blanche.
J'ai plein de choses à dire, il faudra que tu les devines. 
J'ai une pleine page blanche de rouge. Colère rouge. A gommer à blanc ou à laisser fuir, la soupape.
Regarde bien le blanc de mes yeux, ils font silence, mais ils disent beaucoup.
Tu sauras qu'il ne faut pas venir me chercher, c'est une évidence, toi, tu le sais, parce que tu me connais. 
Eux, risquent de s'y frotter, je suis échauffée à blanc, il risque d'y avoir feu. 
Ils ne savent pas, puisque je ne dis rien.
Comme il se doit sur internet.
BDM ce sont vraiment des C. Mais j'ai rien dit, pas vrai?
(ça soulage).

14.11.10

Le cimetière.


Ça faisait longtemps que j'avais prévu d'y aller.
Comme rendre visite à un parent lointain, le genre de visite que tu ne fais qu'une fois l'an. Parfois c'est par obligation.
Mais je ne vais les voir que quand j'ai envie ou besoin. Oui, besoin.
C'est une sorte de courtoisie, les tenir au courant de ma vie, l'air de rien. Marquer les moments importants.
Il y a eu des moments importants, des moments beaux, des moments graves, je suis allés les voir, ces fois-là.
Au début, ils n'étaient que trois. Un jour, ils ont été quatre. Parfait peut-être pour une belote ou un bridge, que sais-je? Je peux rêver qu'ils se trouvent parfois, qu'ils échangent, leur histoire a quelques choses communes, nous, moi, mes enfants.
Le temps passe, les événements aussi, quoi de plus naturel que d'aller poser ses questions, ses rêves, ses élucubrations, devant la tombe de ceux qui te sont chers.
Il pleuvait.
Depuis quelques jours, il pleut comme toutes les larmes de l'humanité.
Il y a eu un vent violent aussi, mais aujourd'hui, il s'était calmé. Pas de danger de branche volante donc.
J'ai dit aux enfants Venez, je vais vous montrer où sont Papi, Mamie, Bon et Mamie-Jo.
Nous avons longé l'église, j'ai dit c'est là que papa et maman se sont mariés. Ils étaient ébahis. Sans doute que c'est quelque chose qui leur est étranger, quelque chose d'impossible, puisque c'était avant. Avant Eux.
C'est un bel endroit.
On ne peut pas dire ça de tous les cimetières. Il y en a tant qui sont plats, anonymes, tristes.
Celui-là, je le connais depuis toujours, je n'ai jamais eu peur.
Leur montrer des tombes, leur montrer des noms. Un lieu, un lieu pour après, peut-être. Le rendre familier.
J'ai dit, devant la tombe au granit rose et lisse, et en redressant les fleurs de la toussaint bousculées par le vent de ces derniers jours, qu'ici étaient Bon et Mamie-Jo. Ma grande a déduit, qu'ils étaient allongés, l'un à côté de l'autre. J'ai expliqué le cercueil que l'on met en terre. En le disant je me souvenais.
"J'aurais la meilleure vue, face à l'église". Elle me l'a dit, un jour, alors que nous devions boire la coupe de champagne d'avant le déjeuner..
Mais pour moi, rien ne valait la vue de l'autre côté.
C'est un cimetière qui dégringole un coteau plongeant. Je sais qu'en contrebas il y a la route en lacets qui mène au Faou, entre autres. On y voit loin. Un peu comme l'océan, rien n'arrête le regard, sauf peut-être aujourd'hui cette mer de nuages gris.
C'est pour ça que c'est la tombe de Mamie et Papi ma préférée.
D'abord, elle a toujours été claire.
Des cailloux blancs, qui, les jours de beau temps, réverbèrent le soleil.
Et puis, la vue.
Ma fille a demandé pourquoi Jesus était tombé, c'est vrai qu'il est allongé sur le lit de pierres blanches, et ma foi, je ne le trouve pas si mal, là. Au repos.
Je ne sais pas où il était accroché avant, je l'ai toujours vu dans cette position. A regarder le ciel.
S'il se tenait assis, il verrait la colline ronde et charnue, aux bosquets lointains, limites de champs bocagers.

Nous avons arpenté les deux allées qui nous concernent. Avec un arrêt devant les noms familiers.
Ce n'est pas la peine de s'adresser à eux en paroles, je me dis qu'il suffit de se présenter face à eux pour qu'ils sachent, qu'ils sachent tout.
Ils ne jugent pas, ils accompagnent, cela me va.
Les enfants ont habité le cimetière de leurs pas de course, de leurs rires et de leurs questions.
Ils savent, d'un bord comme de l'autre à présent, où ils sont et ce qu'ils sont.
Et c'est bien.

11.11.10

Varier...

Je ne pourrai pas t'en vouloir si tu me fais part de ton agacement devant les changements spontanés de mes couleurs.
Je sais bien que ce n'est pas bon pour mon image de si souvent varier.
Mon image.
Elle n'est pas celle que tu crois. Faut-il encore le dire.
J'aime changer, comme j'aime ne pas manger chaque jour le même plat. Parfois, la recette est banale, parfois elle n'a pas de goût, et parfois, elle pétille les papilles...Je ne serai jamais satisfaite. Je ne me contenterai jamais d'une seule recette. Toujours, continuer de chercher, ne pas se lasser, lire, encore et encore, écrire, même sur une nappe en papier.
Dehors, c'est le déluge. Mais un jour il fera beau.
Les arbres ont des feuilles, le vent les emporte, elles tapissent le sol comme un tapis d'or.
Je regarde le vent déménager mon paysage, c'est violent mais c'est beau.

1.11.10

Arc-en-ciel.

C'était hier.
Une journée où toutes les saisons se donnent rendez-vous, un dîner de famille de saisons, avant de laisser la main à l'hiver, qui voudrait bien.
Il y a des moments comme ça, tu as l'impression d'être au coeur des éléments, des conflits, des passions, des bonheurs...tu te fais balader, tu te laisses entraîner, tu suis, en ouvrant grand les yeux et le coeur à tout ce qui se passe à l'extérieur.
Ainsi, il a fait bleu. Il a fait gris. Il a fait bleu et blanc. Il a fait pluie. Il a fait parka, il a fait pull, il a fait tee-shirt, il a fait tondeuse, et feu de bois. Vraiment une journée mélanges.
Et puis.
A midi, c'est décidé, fallait sortir. Prendre l'air. Virer les microbes de la grippe, les éreinter, les refroidir, bang bang.
Il faisait beau. Et puis il a fait pluie.
Mais.
Nous avons dépassé le nuage, nous sommes allés plus vite que lui, et soudain c'était bleu derrière et devant...devant, c'était magique. Un arc-en-ciel complet. Surplombant la petite mer de Gâvres, d'un bord à l'autre, franc et lumineux.
Bien sûr, je n'avais pas mon véritable appareil, duquel j'avais bêtement laissé la batterie vide, seulement mon téléphone. Mais quand même. Tenter de se mettre sous les pieds de l'arc-en-ciel. Courons. Marchons. Eparpillons nous dans la lande salée, tentons d'aller trouver la source des couleurs.
Il y a eu deux arc-en-ciel. A moins que le deuxième n'ait été que le reflet du premier. Tu le vois?
Regarde la guirlande enfantine qui tente de trouver la maison des couleurs.
Et puis. Nous nous sommes retournés. Pour voir la mer. La mer en grand. Que rien n'arrête. Des surfeurs fous s'y ballotaient. Des rouleaux blancs sous le ciel tourmenté, avec un soleil malicieux.
Il fallait parler fort. Il faut souvent parler fort, quand tu es près de la mer, elle est si bruyante.
Nous aurions pu rester des heures. Mais le nuage a fini par lâcher ses cordes de pluie.
A regret, nous nous sommes repliés, des couleurs et du vent plein l'intérieur.