29.7.11

Tiens, je ne trouve pas de titre.

Pourquoi choisir un jour si estival pour aller arpenter les couloirs d'un hôpital?
La fille longe les murs abîmés, plus décrépis que dans son souvenir, elle regarde avec émotion le bâtiment qui a vu naître ses trois enfants et qui abrite une antenne hématologique à présent. Ont-ils laissé du rose aux murs? Les pierres se souviennent-elles des cris des parturientes, et ceux, puissants, des nourrissons enfin nés?
Il fait chaud, le baladeur à l'oreille elle écoute une émission qu'elle podcaste et qu'elle écoute en partie le soir au couchant, sans jamais en connaître la fin. Cette fois peut-être, entre les trajets aller et retour, aura t-elle le plaisir d'avoir l'intégralité du morceau?
Ça ne peut pas faire de mal.
A l'accueil, elle connait bien ce travail, sourire, renseigner, masquer des fous rire, recevoir des fleurs et des compliments parfois "vous êtes un amouuuur" lui revient à l'oreille, elle sourit, comme elle était jeune alors, à l'accueil on lui indique la caisse centrale, tiens, faudrait-il payer avant de consommer?
La dame a un énorme collier imitation argent, teinté de noir par endroit, s'il était en argent il vaudrait sans doute plus d'un mois de salaire, et ce n'est pas à la caisse centrale qu'elle le montrerait, non, ce serait de l'inconscience n'est-ce pas, à moins qu'elle sache qu'on penserait que c'est du toc, alors elle mettrait du vrai?
La fille regarde son collier d'un autre oeil quand la femme lui dit que la carte vitale n'est pas à jour, comment ça? Elle s'en sert une fois par mois à la pharmacie, on ne lui a rien dit, carte vitale, oui tu parles, sans elle le dossier bloque, ah oui, se souvient-elle, peut-être serait-elle dans une autre sécu à présent?
Elle a bien fait d'arriver en avance, avance qui se passe à régler le souci informatique, et enfin, la fille est conduite par la porte A puis par un ascenseur, sous-sol, et vous vous allez au cinquième? et par des panneaux, un angle droit puis deux puis trois, des couloirs, tiens elle ne se souvient pas de la couleur du sol, à l'accueil des examens IRM/Scanner/Radiologie. L'accueil des grosses machines quoi.
Vous n'avez plus qu'à aller dans la salle d'attente au fond du couloir, la dernière voit-elle, laissant dans son sillage celles de la radio et du scanner.
Elle s'installe sur un siège, inamovible, attaché aux autres tout le long d'un mur d'une trentaine de mètres, sur un sol beige et rouge. Elle est armée d'un bon polar, Dennis Lehane, Un pays à l'aube, et elle fait bien. Une heure s'écoule pendant laquelle elle va aller voir décoller l'hélico rouge et jaune, juste derrière, et puis attendre. Boston dans les années après-guerre n'est pas une ville calme, elle aime le héros, sa femme et ses amis, elle est acquise à sa cause, leur cause, espère qu'ils vont réussir à changer et sauver le monde, elle est naïve, elle y croit.
Enfin, son nom.
Elle passe dans l'antichambre minuscule où elle se vêt de ces abominables blouses à un bouton pression dans le dos, de celles dont elle sait parfaitement la vie avant qu'elles se posent sur les peaux patientes, du lavage au séchage et repassage, ses doigts s'en souviennent (un bouton pression brûlant à fermer sur un cintre en métal).
Il disent sur l'affiche que le lit est confortable et qu'elle entendra le bruit d'un tambour. Qu'il ne faut pas qu'elle bouge. Et dans toutes les langues, on s'assure qu'elle n'est pas enceinte, qu'elle ne porte aucun pace-maker, ni aucune autre prothèse. On l'avertit, on la prévient, on la met en garde, et la dame aux cheveux gris avec ses lunettes dorées et carrées fichées dedans, le lui demande encore. Elle la fait allonger sur un lit confortable donc, elle lui met un casque aux oreilles avec de la musique "parce que ça fait du bruit" lui dit-elle. Ah.
Elle lui bloque la jambe avec des coussins, "ne bougez pas surtout, soyez sage"   lui dit-elle en bougeant ses doigt sur le clavier imaginaire d'un piano. Facile, me dis-je.
Elle s'en va et soudain elle entend le bruit de sa machine à laver puissance dix, sans la protection phonique, ou bien le bruit d'un marteau piqueur qui défonce les rues de Brest, ou bien...
Elle n'entend absolument plus aucune musique, Norah Jones a trouvé plus fort qu'elle.
Pas bouger. Facile. Pourquoi est-ce que l'immobilité forcée appelle au mouvement?
Respirer tranquillement.
Pas bouger. Ne pas gratter mon orteil. Ne pas éternuer. Pas facile.
Voir le plafond. Des taches sur le plafond. Une fête avec trop de champagne? Un soir de débauche entre agents hospitaliers, pour un départ en retraite, ou une naissance, un mariage?
Ça dure longtemps. Ça la gratte. Ça la chatouille. Elle s'endormirait presque. Et enfin, le silence. Le lit plateau qui se meut en dehors de la bouche bruyante.
Elle se rhabille. La dame lui dit oui, ménisque. On verra plus tard avec l'orthopédiste. Elle lui montre. Elle s'intéresse, ça l'intéresse, cette mécanique imparfaite, le pourquoi de la douleur, comprendre.

Je me suis perdue en prenant la mauvaise sortie, dans le parking de l'hôpital. J'en ai fait un tour complet. J'écoute l'émission jusqu'à son terme en ayant envie d'aller m'acheter des tonnes de bouquins. J'ai envie d'une crêpe, d'un coca. Je flânerais presque.
Voir et laisser venir.

23.7.11

Croire

Je crois qu'il va faire beau. Peut-être fait-il beau, déjà?
Lu, "Un homme" de Philip Roth, je crois que j'aime bien Philip Roth. Simple, évident, efficace, bien.
Il faut croire aussi qu'on a enfin fini les chambres des enfants, plein de murs en lambris large et clair plus loin. Ils y seront bien, je crois.
Il semble quand même que j'aie la chair de poule, avec ce vent frais de mai. Ah? Nous sommes en juillet? Je croyais pourtant...
J'ai postulé pour un mi-temps bibliothèque, dans un lycée semble t-il, au fond je ne suis pas sûre, les secrétaires sont en vacances et l'annonce ne dit rien. Je crois que c'est un lycée horticole. J'aime bien les fleurs.
Les Hôtes sont tous contents, pour le moment, ils me le disent, j'aime ça, c'est plus facile, que de faire semblant d'y croire. J'attends des Allemands, ils m'ont dit 16H00 mais je crois bien que la route et les bouchons...
J'ai mis une cloche à l'entrée. Pas moi, une vraie cloche, lourde, en fer forgé, qui fait hurler certains, mais dont j'aime le son cristallin. J'ai l'impression qu'on tchine deux verres de cristal quand on fait ding avec le gong. Je crois que c'est une belle entrée, de trinquer. Non?
Il y a un espace qui sera mien, on dirait, pour faire un minuscule bureau, bientôt. Il croit que c'est possible. Je hausse le sourcil, je ne crois plus rien, j'attends.
Fera t-il beau demain?


15.7.11

Miscellanées gourmandes.

C'est pas dans l'ordre. 
C'est mélangé. C'est comme la vie que j'aime, des moments disséminés dans la journée, dans le temps. 
La prune, c'était hier. 
Il y a plus de trois kilos de fruits cueillis à l'arbre qui attendent d'être mangés crus, cuits, confits. 

 Qui a dit que c'était la pomme le fruit défendu qui a précipité l'humanité dans la déconfiture?
Pourquoi pas la prune, ce fruit à la chair si douce et si sucrée?

 Et comme si ça ne suffisait pas, il y avait un, dix, vingt papillons qui voletaient autour des fleurs. Ils sont revenus avec le soleil, avec la chaleur, et ils ajoutent des pétales aux fleurs...
 Là, ce jardin est immense. Il déborde. Il n'a pas de limites. Il va aussi loin que le regard porte, dans l'aber, dans l'eau, dans le ciel, vers l'horizon.

 En parlant de ciel, il nous fait de beaux cadeaux parfois. Comme sur cette plage où soufflait le vent dans les nuages, nous donnant à voir la lumière...
 Ou les galets...
 Ou les coquillages.
 Mais.
Mais tu vois, il se passe aussi des petits miracles. S'il y a bien un machin volant que j'aime plus encore que les papillons, se sont les libellules. Je n'en vois jamais près de mon eau salée...
 On s'est perdus en forêt de Camors, un étang, et des centaines de flèches bleues, rouges, noires...
J'y retournerai, car prendre ces bêtes là avec des enfants près à plonger dans l'eau noire parce qu'ils sont trop près du bord, juste parce qu'ils sont attirés comme moi par les ailes transparentes, n'est pas chose facile. Il me faut du temps et apprendre à régler mon appareil pour prendre ces natures vivantes et mobiles ce qui me change considérablement de mes salades de fruits sagement immobiles...

A bientôt...

12.7.11

Le camion du fromager.

La route monte. Un peu. Juste de quoi ralentir les moins puissants. Devant moi, un camion de fromagerie. Il a l'air, il doit, revenir du marché. C'est sûr. Certain. Il est quatre heures, et il avance à l'allure de quelques chevaux. Pour un peu, j'imagine une roulotte tractée. C'est juste moins poétique, cette camionnette blanche, avec l'auvent qui flotte au vent, coincé sous la paroi du côté droit.
La route monte. Nous faisons du cinquante à l'heure. Un cheval? dix? je suis loin des 120 ou 160 maîtrisés sous le pied, l'autre jour.
Je ne me presse pas. Forcée peut-être. Mais je connais cette route, je sais qu'il ne sert à rien de tenter quelque manoeuvre de doublement que ce soit. Les virages. C'est une route de douce montagne. Elle monte, sans épingle à cheveux, elle sinue.
Je flâne.
A ma droite, de l'espace. La campagne vallonnée, verte, et brune, et jaune des blés. Les talus frisés. De chênes, de hêtres, de noisetiers. A chaque fois, je veux m'arrêter. Cesser tout mouvement et tout bruit de la route, pour admirer ce paysage silencieux, grand et vaste. J'imagine les courbes à l'ombre des arbres. Je vois les couleurs changer au passage des nuages. Comme un négatif du ciel sur la terre. je voudrais prendre une photo. Mais je sais que jamais je ne parviendrai à rendre ce que je vois. J'ai essayé. En vain.
Le relief. Je suis sur une hauteur et je surplombe des kilomètres de collines et de monts. Peu d'habitations. Des moutons. De la lande. Des terre vierges. Parfois, je sais qu'elles sont noires, l'été, quand le feu prend dans la tourbe et enflamme des milliers d'hectares.
La nuit, aucune autre lueur que celle des étoiles, de la lune quand il n'y a pas de nuages, peut-être la torche de l'Ankou qui tire sa charrette, juste pour qu'on puisse voir la blancheur de son squelette ou encore son sourire édenté. La nuit, je ne viendrais pas aux Portes de l'Enfer, le Yeun Elez, l'endroit même où le lac de Brennilis trouve sa source. C'est magnifique en plein jour, l'automne surtout, avec les couleurs orangées de la lande. Mais sous l'eau calme, un gouffre, une ancienne mare, sans fonds, dans laquelle on jetait l'âme de ceux à qui l'on refusait le paradis.
 La Noce de pierres, Eured Ven, me rappelle encore que cet endroit est chargé d'histoires, et qu'il n'est pas bon de s'y perdre. Pourtant, quand je grimpe le Tuchen Kador, un soir d'hiver, et que je vois le soleil se coucher, enflammant de rouge les nuages, il n'y a rien de plus beau. Je sais que de là-haut, je suis sur le point le plus haut de Bretagne. Et ça me rend toute petite.
Il fait lent, sur cette route, cet après-midi d'été. J'ai le sourire en voyant le camping-car qui me suit s'approcher de moi comme pour une tentative de me dépasser. Je sais bien, qu'il n'y aura pas d'endroit avant quelques kilomètres pour que la route permette cette acrobatie à un véhicule aussi lourd que le sien.
A quoi bon? Perdre cinq minutes et tourner la tête pour se remplir les yeux.
Un jour, peut-être, je parviendrai à restituer ce paysage magique, hypnotique, qui me prend aux tripes à chaque passage, de plus en plus alors que l'âge va de l'avant. Dans quelques mois, je me ferai le plaisir d'une randonnée, quand j'aurais retrouvé l'usage de mon genou, comme un pèlerinage. Traverser cette lande, de Gwarem Edern au Menez-Mikaël. D'autres l'ont déjà fait en courant. Alors, en marchant.
Et je photographierai de la plante de mes pieds chaque relief de cette terre que j'ai l'impression d'encore moins bien connaître depuis que j'ai envie de la savoir mieux.
Un fou me double enfin. Moi et la carriole à fromages qui brinquebale devant moi. Je souris encore. Je sais où il va et qu'il n'a plus qu'une centaine de mètres à parcourir.
A quoi bon, me dis-je. Il n'a pas vu tout le paysage, il s'est escagassé contre la lenteur. Je me suis garée à sa hauteur, quelques secondes plus tard, alors qu'ils ouvraient juste la portière.
J'ai encore cassé mon porte-monnaie à la maison des artisans.
Un jour, toute ma vaisselle sera dépareillée mais belle.
Et je suivrai le camion du fromager jusqu'à chez lui, pour goûter ses fromages.

10.7.11

Clou.

Le clou du spectacle?
De ma vie je n'avais planté autant de clous. Clous qui pique, clou pointu, clou à tête plate, clou de girofle. Je m'égare.
Enfoncer le clou?
Un matin, hier en fait, j'ai même pris mon majeur gauche pour un clou, il en reste un point noir, pour me souvenir.
Les enfants rentrent aujourd'hui. On a bossé comme des clous, euh, fous, mais on a encore des finitions.
Les finitions, c'est ce qui prend le plus de temps. Tu te dis que tu as fini, mais non, une découpe par ci, une autre par là.
Je sais donc poser un lambris, jusqu'à 2,60 mètres de haut.
Un clou chasse l'autre?
Maintenant, nous allons nous attaquer aux peintures, lundi, il nous faut plus de plancher, tiens, un plancher flottant dans une maison en bois, et on pourrait s'amuser d'un radeau de la méduse.
Il fait beau ce matin, les Zotes sont adorables, hier soir en arrivant ils nous ont offert une bouteille de leur vin, et nous l'avons dégusté, fatigués que nous étions, avec un grand plaisir.
Tu sais quoi? Nous n'allons pas nous attaquer à la chambre d'hôtes numéro deux tout de suite, elle ne sera pas ouverte cet été, mais nous pensons y parvenir pour l'automne. En attendant, je viens de passer commande pour les draps, nous les utiliserons dès cet été, et toc!
Je voulais te mettre une photo, mais les zotes étant partis en balade, c'est l'heure de la scie circulaire et des clous. Je cloue, tu cloues, il cloue...dit-on clouer ou clouter au fait? ah ah ah!

2.7.11

Travaux...

C'est à croire que notre maison est une maison légo. Nous y transformons toujours quelque chose.
Les enfants ont eu une chambre chacun, puis c'est devenu la chambre d'hôtes. Ils dorment depuis deux ans dans la même chambre. Pour leur plus grand plaisir. Mais voilà qu'ils grandissent. Ils ont besoin de leur espace à eux, nous le voyons bien, surtout pour ma grande. Mais la maison n'est pas extensible.
C'est pour ça que, loin d'être à une contradiction près, nous décidons de leur créer une chambre à chacun, un nid, un lieu avec juste assez de place pour un lit, de quoi ranger des jouets et un bureau.
Et c'est aussi dans l'optique de faire une deuxième chambre d'hôtes. Mais cette fois, c'est notre chambre à nous qui va être utilisée.
Alors, nous avons commencé.
C'est une maison en bois, nous ferons des cloisons en bois. Des demi-chevrons en guise de poteaux intermédiaires pour soutenir le lambris clair et l'isolation. Des fenêtres de toit ont été ouvertes (nous avions le permis pour ça, mais le manque de sous nous avait empêché de le faire jusqu'ici), pour que chaque chambre aie sa fenêtre.
Et puis la deuxième Breizh kiss... Comme d'habitude, je commence par la fin, je suis déjà en train de regarder sur le site de couleur-chanvre.com pour trouver des draps jolis.
Je vais t'expliquer.
On voudrait faire une chambre d'hôtes double, c'est à dire un endroit où pourraient venir deux couples d'amis, ou bien une famille de deux ou trois enfants. Il y aurait une entrée commune, et une chambre à l'étage. Nous pensons à des familles ou des amis car il faudrait partager la terrasse, et qu'ils aient les mêmes horaires de couchage pour que les uns ne réveillent pas les autres en rentrant le soir. En revanche, chacune des chambres a sa douche et ses toilettes, je te dis pas comme on réfléchi en ce moment même à la façon d'organiser ça, tourner autour d'une douche, le lavabo etc...C'est du boulot (c'est l'homme qui fait, je l'aide quand je peux "pince, couteau, scalpel...") mais notre maison s'améliore, enfin, s'améliorera parce que pour le moment c'est total bazar....Rien qu'hier, nous avons descendu la baignoire en fonte, c'est un poids terrible ce truc-là, on était pas trop à quatre.
En plus, je voudrais un espace à moi, un petit bureau, mais je ne sais pas dans quelle mesure (au sens propre) ce sera possible. C'est même quasi impossible.
C'est l'investissement pour la "BK enterprise" (c'est le nom qui est écrit sur le dossier qui concerne la chambre d'hôtes).
Merci les beaux-parents. :-).