30.4.10

L'Homme qui parlait au Vent (conte du hamac)

Depuis quelque temps, le vent souffle.
Faut voir, il n'y a pas un seul nuage dans le ciel depuis au moins deux semaines.
C'est inhabituel.
J'ai voulu en savoir plus.
Je suis allée là où j'étais sûre de rencontrer le vent. Tu peux, toi aussi, si le coeur t'en dit, aller voir là-bas, ce n'est pas si loin, une grande côte, une montagne, une vaste prairie, de l'espace où le vent se nourrit.
La route la plus sage, ici, c'est de suivre la côte. Je trouverai, car je suis en moto. Et en moto, chacun sait que le vent parle vite, tu le sens avant les autres, il peut rester sage, ou pas. C'est à toi de faire attention, tu ne gagneras pas à faire la maligne à croire que le vent ne t'abattra pas.
Alors, j'ai suivi la ligne d'horizon, imprécise aujourd'hui car une sorte de brume s'amusait à faire la gomme sur le trait, crois-moi il fallait regarder à deux fois avant d'être sûre de distinguer le ciel de la mer.
C'est amusant de voir que c'est au moment où plus rien n'a de limite ni de frontière, que c'est le plus beau.
J'ai garé ma moto, là où c'était marqué interdit de stationner. Parce que le vent avait commencé à agir, et me mettait les idées à l'envers. D'ailleurs, je n'étais pas la seule.
Parking, vue mer.
Au début, il n'y avait personne.
Juste un ou deux fous, des fous de vents, qui connaissent un peu le spécimen, car ils avaient mis des casques.
Tu vas à la mer et tu mets un casque. Le vent je te dis, les idées, à l'envers.
J'ai posé mon sac et mon livre (oui, j'avais l'intention de lire aussi, on m'a dit que ça faisait sage, ou bien que l'attente serait moins longue)  sur un sable si blanc, que toi, tu te sens bronzée illico.
C'était beau, il faut le savoir.
De la couleur, du blanc, du bleu, du vert. Beau.
En plus, le sable était chaud.
Oui, j'ai enlevé mes bottes. Je suis allée marcher pieds nus sur le sable, tenter de rejoindre la mer, je me disais en passant que j'aurais alors plus de chance de croiser le vent.
Je n'avais pas tort.
Il soulevait mes cheveux en forêt d'épineux, il passait sous ma veste et me chatouillait les côtes, il tentait même de me faire tomber, mais j'ai tenu bon.
J'ai tournoyé, pour sentir son souffle autour de ma tête, sur mon visage et dans mon cou.
J'ai écarté les bras, pour qu'il voie bien que j'étais sans arme.
J'ai couru avec lui, pour qu'il me pousse.
J'ai marché tout contre, pour que j'apprenne.
Je ne me lasse pas du vent.
As-tu remarqué? quand il te parle, tu ne peux rien faire d'autre que l'écouter. Si un quidam tente de te faire croire une de ses quatre vérités, emmène le au vent, tu verras sa bouche faire des ronds, il ressemblera à un poisson.
J'aime le vent.
Et puis, à force de tournoyer, j'ai vu tous les côtés de la plage.
De plus en plus de monde était venu tutoyer le vent.
Mais un seul a retenu mon attention.
Un type, l'air de rien, une silhouette dans le lointain, une ombre, un fil, qui menait son vent à la baguette.
C'est vrai, je te promets, regarde bien, j'en ai la preuve en image.
Tu vois?
Comment penses-tu que ce soit possible ça, si cet homme là n'est pas celui qui parle au vent?

26.4.10

Bike by Night

Voilà un texte que j'ai écrit ailleurs.
J'ai eu envie de le mettre ici, car Pakita un jour a parlé de moto, et elle voulait voir si j'avais mis quelque chose ici, à ce sujet.
Et puis, j'ai réalisé que non.
Alors voilà.

Bike By Night. (Un texte pour un ailleurs).


Tu sais, tu m’as vue sur ma moto. Tu as dit, elle fait petite, oui, elle est petite.
Je l’aime pourtant, elle est à ma taille.
Petite moto, jeune motarde. Je ne dis pas petite motarde, non, parce que je ne parle pas de taille, là.
Ainsi tu m’as vue.
Et crois-moi, j’étais plus empruntée et plus maladroite que jamais. Ça faisait longtemps que je n’avais pas calé au démarrage, ni été aussi brusque à chaque passage de vitesse. Tu regardais mes pieds, dis-tu ? ils n’ont pas dû t’apprendre grand chose.
Et pourtant.
Parfois, je suis fluide. Rien, aucune secousse ne signale le passage de vitesse, juste la musique du moteur, qui ralentit quand tu relâches la manette des gaz (main droite) que tu glisses ton pied (gauche) sous la pédale des vitesses, et que ta main gauche attrape sûrement ce que tu prendrais pour un frein sur un vélo, qui est l’embrayage sur la moto, et que cette main ferme se détend doucement pour rendre la vitesse souple et veloutée.
Et ce soir, j’étais comme ça.
Souple.
La route, de campagne, un ruban noir, d’autant plus noir la nuit, aucune signalisation blanche au sol.
Le casque, ouvert aux points de ventilation, c’est le printemps ; j’avais remis la doublure de ma veste, la nuit l’air est frais. Mes bottes, toutes neuves, conçues pour la moto, qui se glissent sans effort aucun sous la pédale de vitesse, celle qu’il faut monter de 1 au point mort, puis 2, 3, 4, 5, main gauche en coordination avec le pied, du velours, je te dis.
La nuit, la route est noire et courte. Elle finit à la limite de tes phares. Ils éclairent presque mieux que ceux de la voiture, j’ai mis les pleins phares aussi. Petite, mais grande, ma moto, je suis bien dessus.
Je n’ai pas froid, crois-moi, c’est du luxe, il ne pleut pas, et je glisse sur un goudron sans ratures.
C’est étrange, je vois la phosphorescence des insectes qui surgissent devant la lumière blanche, je les vois se jeter sur moi, comme de petites étincelles, celle des cigarettes de ta douce, la nuit, tu vois ?
Et j’arrive au bourg. En ville. Les lampadaires. C’est mon ombre qui se dessine alors sur la route, elle apparaît devant moi, puis se place sur le côté et disparaît, à chaque lampadaire. Ainsi je suis une et plusieurs à la fois.
La lumière et la moto, dans la nuit.
Je me sens bien, seule, sur mon engin volant dont j’aime le bruit quand il ronronne, un bébé tigre, mais tigre quand même.
Je ne peux pas lui dire que je l’aime, à ma moto, je serais ridicule, ce serait ridicule, il ne faut pas s’attacher aux choses. Mais.
Je l’aime. De son noir brillant, à son cuir mat, de ses chromes rutilants, à son bruit ronronnant.
Et je me sens libre, là. Dans le vent.

Ombre et lumière.

Il fait beau.
Un vrai beau.
Le genre de temps avec du bleu et du blanc dedans, et puis du chaud et juste ce qu'il faut.
Alors, c'est un temps qui rend audacieux.
J'aime bien ce mot: il y mêle audace et cieux. De quoi se dire qu'avoir la tête dans les nuages c'est périlleux?
Ou bien, qu'il faut oser, pour voir si le ciel nous tombera, ou pas, sur nos têtes envolées.
Si beau qu'il m'est venu l'idée (par la tête ou les pieds, je ne sais, car l'herbe aussi peut avoir un goût de paradis) l'idée saugrenue de me mettre à écrire dehors.
Oui.
Mais voilà.
A l'heure ou le concret s'apprécie en degrés et en couleurs, en herbe et en saveurs, moi, j'ai besoin de cet outil volatile, qui, s'il tombe, se perd, s'il se perd, disparaît, je parle de cet engin voué aux Gémonies (c'est ça qu'on dit) parfois, un greffon surnaturel, un truc que je ne lâche plus, tu le sais, toi et vous, cet ordinateur là, oui, c'est de lui que je parle.
Bref, l'ordinateur n'aime pas la lumière.
Il préfère l'ombre. Pour être vu, pour être lu.
Et moi, c'est le soleil.
Mettre du soleil avec de l'ombre.
A l'heure où je vous parle, j'ai la solution.
Mais elle est périlleuse.
La dernière fois que je l'ai mise en application, il a plu un mois durant.
Les Gémonies, sûrement.
Néanmoins, j'ose.
C'est déplié, c'est dehors, c'est en train d'être rincé.
C'est jaune soleil, au cas où.
C'est pour bientôt, ce soir au plus tôt, et alors, et alors, je pourrais écrire de dehors.
A l'ombre et au soleil.
Une belle tonnelle.
Eh eh.

24.4.10

Merci

Publiquement, je le dis, oui: Merci.
Je ne sais pas pourquoi, cette année je me suis sentie particulièrement soutenue, aimée.
J'ai eu des surprises, j'ai été émue, je suis gâtée.
Si parfois on croit avoir touché le fond, si parfois on se dit que ça ne peut pas aller plus mal, il y a aussi des jours où tout va, on oublie le mauvais, on l'enfouit, on fait la paix avec le côté obscur de ce qui ne dépend pas que de nous, mais qui nous enquiquine bien quand même le quotidien.
Alors, voilà.
Ces dernières semaines, je me suis souvent sentie sur un petit nuage.
Des mots, une photo, un livre, des odeurs, des trains, des villes, des humains,  des amis, des parfums, un hamac, du chocolat, un accessoire indispensable pour le deux roues qui me pilote, de quoi faire des cafés mousseux, des dessins, de quoi peindre la terre en couleur, de la musique défrisante, j'ai tout eu.
Et plus que ça encore.
J'ai réalisé que je n'étais pas seule.
Qu'on pensait à moi, suffisamment pour me le dire, pour me le faire savoir.
Sans doute qu'avant c'était le cas, déjà.
Mais cette année c'est un goût encore plus doux, encore plus vrai, comme si ma vie était une toile d'araignée, fragile, mais de plus en plus grande, et soutenue par tant de fils que jamais elle ne pourra se briser tout à fait.
J'ai appris aussi la valeur de l'amitié.
Sans doute avant je la savais déjà. Mais cette année encore, des liens plus forts, ceux que l'on s'attache aux cinq doigts de la main, des fulgurances inattendues, auxquelles on croit absolument.
Et si je le dis ici, c'est que vous vous reconnaîtrez parmi cette multitude de bonheurs que j'ai, là, acquis, dans la main, et même si ça passe, même s'il s'en va, il aura été, et ça, je me le garde.
Je vous embrasse.

20.4.10

On aurait pu

On aurait pu chercher et peut-être trouver, une cave voutée, avec de belles pierres blondes et des bougies pour éclairer.
On a failli se retrouver entre deux rendez-vous importants, entre la poire et le fromage, et on aurait pu faire ça vite, dans l'urgence, par manque de temps.
Heureusement, on a pas pu.
Non.
On a préféré se retrouver, un jour sans travail, un jour comme ça, entre le café et le goûter.
Les enfants faisaient la sieste, le chocolat fondait sur les framboises dans l'assiette, et le café attendait.
Il se trouve qu'à défaut d'une cave voutée, on avait l'ombre d'un grand Charme.
On avait les bouteilles.
Les bouchons.
Le truc qui pousse le bouchon dans le goulot.
Le vin.
Que dis-je, la lumière liquide du soleil de ce jour là.
Et chaque fois qu'on en boira, il aura le goût de cet après midi de printemps, entre amis, au soleil, à l'ombre paisible d'un charme envoûtant.

14.4.10

Ecrire.

Personne ne sait comme j'écris.
L'oiseau, là, dehors, celui qui joue toujours la même note, il ne le sait pas, il s'assourdit tellement de sa musique qu'il est aveugle, il ne voit pas derrière le carreau ce qui s'y passe.
La voisine, qui ne me voit pointer le nez que pour prendre un café terrasse ou la moto ou le courrier, ou des photos de fleurs, elle ne sait pas, que mes doigts travaillent à longueur de clavier.
La copine, celle qui envoie des mails, celle qui me parle à l'école, celle qui m'invite au café (oui, café terrasse, mais aussi café copine, j'aime le café), celle qui ne me reconnait pas à dos de moto, non, elle ne sait pas que mon emploi du temps c'est faire ce que j'ai à faire, mais d'abord écrire, même n'importe quoi, écrire.
La famille, le cercle petit, ceux qui sont autour de moi , me voient, trop peut-être, devant la machine, mais ils ne savent pas ce que j'y mets, ils ne me lisent pas, même s'ils en avaient envie, je ne sais pas si je dirais oui.
La famille, périphérique, la couronne, elle ne sait rien, mais rien, encore moins que rien. Peut-être un profil FB de ci de là, mais le blog, nan, ne sait pas.
En parlant de blog, j'y écris bien sûr, mais pas tous les jours, loin de là, vous le savez puisqu'il n'y a rien de nouveau sous le soleil d'LVQA.`
Alors quoi? t'écris où?
Figure toi que j'ai Word, un truc qui te fait une belle page blanche qui ressemble à celle où tu pourrais lire des trucs. Si tu veux te croire écrivain, tu peux choisir la police que tu veux, des polices aux noms bizarres, à la forme épique, à la pointe acérée, ou au rond tout mou, tout doux, cela dépendrait presque de ton humeur du jour.
Voilà, maintenant j'écris sur Word et je ne publie pas le quart de ce que j'écris. Ou pas ici.
Un jour peut-être.
Juste pour dire, que parfois écrire c'est inside, c'est personnel, ça reste en dedans.
Ou alors j'écris et j'envoie à qui je veux, à qui de droit, un exercice, un moment, un plaisir, un partage,  un échange, un dialogue muet de mots variés.
J'écris dans ma tête parfois, avant de le mettre en pixels, une phrase qui ressasse, un mot qui revient, desquels le reste s'invente, se raconte, se confie.
Ne pas écrire, ne pas avoir accès à cette page blanche avec le trait qui clignote, le trait magique, et je suis en manque. Un manque physique, qui me fait tourner en rond, me tordre les mains, ne plus réussir à réfléchir sur les choses du quotidien, ne pas écrire et c'est une obsession qui s'installe, je n'avais peut-être rien à dire, mais c'est comme s'il y avait péril.
Je reste immobile, on me parle je ne réponds pas, je note le chant de l'oiseau, la douceur de l'herbe, la couleur du ciel et le vent sur mon visage, je le note mais tant qu'il ne figure pas sur la feuille, il m'obnubile, comme la vague qui revient toujours, marée haute ou basse, la vague est toujours là.
Et je n'avance plus.
Alors je me sauve de moi-même en me convaincant que je n'oublierai pas la phrase qui est là, le mot qui s'imprime, je me console en remettant à demain cette seule chose que je veux faire le jour même, et aucun mot n'est irremplaçable, tout peut encore arriver, la patience est un art, un talent, una qualité rare.
Cultivons, cultivons la patience.
Et vous? écrire?

11.4.10

Le Rêve. (Conte du Hamac)



Personne ne pensait que cela fut possible. Mais pourtant.
Un jour, je fis un rêve et je m’en souvins.
C’est à cause du vent.
Pas celui qui rend fou, juste le vent pas sage.
Parce que moi, je suis sage. 
Enfin, permets que je le croie, dans mes rêves, je suis sage.
Je suis assise au sommet de la colline et le vent me contourne. Il passe contre moi, il me frôle, il murmure à mon oreille, me fait cligner des yeux, mais jamais ne me fait basculer ni tomber, juste il me fait frissonner.
C’est tout le bien qu’on souhaite au vent pas sage, n’est-ce pas ?
Ainsi, personne ne lui en voudra.
Ca, c’est dans mon rêve.
Dans la vraie vie, celle des soucis et de la pluie, celle des tempêtes et des orages, celle du vent fou et des nuages, dans cette vie-là, le vent pas sage a un pouvoir sur moi.
Mais je ne te le raconterai pas, parce que là, je raconte juste mon rêve.
Le vent pas sage de la colline a descendu à rebrousse poil, un chat qui passait par là. J’ai vu le pelage se dresser, le chat sursauter, le vent mugir à ses moustaches.
Je ne saurais dire si le chat était content. Un chat qui se mord la queue, ça n’a ni queue ni tête, comme un rêve, en somme. Alors ça tombe bien me diras-tu.
Le chat fit alors plusieurs tours sur lui-même. Pour rattraper mon rêve ? pour courir après une chimère ?
Non, un papillon lui faisait tourner la tête. Parce que le papillon et le vent pas sage sont de grands copains, et quand ils se voient, c’est farandole, sur le dos du chat.
Moi, au sommet de ma colline, je rigolais.
As-tu déjà ri au sommet d’une colline, dans un rêve, avec le vent qui te contourne, murmure à ton oreille, te fais cligner des yeux, sans jamais que tu ne chutes ?
Je te conseille de l’essayer au prochain rêve où tu te décideras à te souvenir.
Juste parce que tu ris, tu ouvres la bouche et le vent pas sage s’engouffre. Et là, ton cœur bat. Oui. Même dans un rêve.
Revenons au chat.
Le chat qui danse avec le papillon et le vent dans ses moustaches.
C’est beau tu sais, le bond du chat. L’envol qui se veut pareil à celui du papillon. Avec les courants du vent.
De ma colline, je vois tout.
Le papillon, le chat, le vent qui va chuchoter l’oiseau.
Le vent pas sage est fripon, tu t’en doutais.
Et l’oiseau, ah ah, il sait aussi, l’oiseau. Il a ses armes. Un chant plus grand que le murmure du vent. Il trille, il hulule, il coucoule, il pisote, il zinzinule, il gajole, il babille, il pépie, il jacasse et il chuchote aussi.
De là à dire qu’il n’a pas peur du vent, il n’y a qu’un passage, le chas du chat, la moustache qui frise.
C’est un rêve te dis-je, dans les rêves parfois…
Le papillon, le chat et l’oiseau s’accompagnent du vent. Je les observe du haut de ma colline, d’un peu loin ; il ne faut pourtant pas que j’oublie que j’ai avalé à gorge déployée un bout de ce vent fripon.
Tu sais quoi ?
C’est bon.

Je ne peux pas te raconter le vent pas sage dans ma vraie vie, tu rougirais.
Oh, je sais que tu n’as pas peur de rougir, ou que bien peu de choses te font rougir, alors je rectifie, c’est moi qui rougirais. Il ne le faut pas, n’est-ce pas ? toi qui ne me connais pas en vrai, qui n’a que des images de rêves, les morceaux que je te raconte, du fond de mon hamac.

Le vent pas sage a déposé quatre chatons à ma porte ce matin. Le premier va s’appeler Papillon, le deuxième Zinzinule, le troisième, Vent-fripon.
Le quatrième ?
Et si je lui donnais ton nom ?

Une histoire à ma façon.
D’un rêve sans façon, qui se permet ses aises, et de couler d’encre.

Conte du Hamac.


8.4.10

Heureusement...

...qu'il y a le printemps.
Tu respires enfin le parfum de l'herbe fraîchement tondue. Tu oses enlever tes godillots pour quelque chose de bien plus beau, les papillio...
Et puis même, avant, tu mets ton pied nu sur l'herbe. Tu trouves frais, tu trouves doux, tu trouves encore un peu humide, mais il faut bien que l'hiver se passe.
Enhardie par ton audace, tu regardes d'un peu plus près les branches sèches et tordues des arbres, que dis-je, des arbrisseaux, et là, que vois-tu?
De minuscules protubérances, et la fulgurance te paralyse de joie: il n'est pas mort!
Mais non.
Tu remarques alors que les fleurs de l'abricotier, tiens, tu as dis fleurs, il y a donc des fleurs!
Et puis le bleu tendre des myosotis, ces ridicules petites fleurs bleues, si belles, si fines, si parfaites, que tu sais juste les prendre en photo, mais point les peindre, d'ailleurs tu ris de seulement y penser!
Pour un peu tu te ferais cabri.
Essaie un peu pour voir; tu mets de la musique, Frizzante au hasard, un petit bijou de gaieté, et tu fredonnes, farandoles, la vie revient, heureusement qu'il y a le printemps.
Tu as mis ton linge à sécher dehors, tu constates qu'il est sec en deux heures, tu as mis un pull parce que en avril on t'a dit, mais tu ne peux le garder.
Tu mets le pain au levain derrière la vitre, il va lever cette fois, c'est sûr. Non, rien n'est moins sûr, mais un pain au levain qui ne lève pas mais qui dort au soleil, c'est mieux que rien, c'est le goût du printemps.
Tu as envie de dire, d'écrire, tu essaies, tu rates, ça ne vient pas, au fond, le printemps c'est ta chanson, et tu voudrais juste en donner le ton.
Parce qu'avec le printemps, tu peux supporter l'hiver.
Voir venir l'été, t'y préparer.
Et que rien n'est perdu, puisque le printemps.

Et bon anniversaire petit M. de trois ans. :)

5.4.10

38

A cette occasion, je me rends compte que j’ai déjà beaucoup parlé de ça.
Les années qui nous viennent comme ça.
Sans qu’on s’y attende.
J’avais oublié qu’à 35 déjà, je pensais aux 40.
Mais si on m’avait dit qu’à 38 je me sentirais plus jeune qu’à 35, jamais, jamais je ne l’aurais cru.
Est ce que plus on vieilli plus l’âge est relatif ?
Oui, sans doute.
Je vais vous dire ce que je ressens, là, aujourd’hui que je me prends 365 jours d’un coup.
Capable de tout.
Voilà.
Je me sens capable de tout. J’ai fini de me poser des limites.
Je veux croire que tout est possible, qu’avoir envie c’est déjà réaliser, et réaliser, ah ! pourquoi pas !
Je suis en pleine possession de toutes mes forces, je me sens fourmilière, active à l’intérieur.
Excessive aussi dans la joie comme dans la douleur, je suis un chamallow, on peut me plier, m’écraser ou le tenter, je retrouverai ma forme, à peine esquintée.
Je profite. Du ciel, du vent.
Le vent que je laisse entrer dans mon manteau, qui traverse ma peau jusqu’aux os.
Le ciel, pour sa couleur, ses couleurs, du blanc au noir, toute la gamme.
Et le soleil.
Bien sûr le soleil.
Je me fais des promesses, à moi seule. Les plus vraies, les plus efficaces, les plus insensées, les plus folles, les plus enragées.

Aux deux filles d’avril que je connais, ma sœur jumelle de dix ans et Aurore, ma belle italienne, je dis simplement, olé les filles, la belle vie, elle est devant, encore !

Je vous embrasse !