29.3.09

Papillon

-»Maman, maman, je peux sortir sans manteau? »

Tu cours, tu ouvres la baie vitrée de tes petits bras, tu sors le museau à l'extérieur pour sentir l'air...

- »Maman, il fait beau, regarde, je peux sortir sans manteau? »

Vas-y ma jolie...

Tu sautes à pieds joins de la terrasse sur le gazon, tu t'esclaffes de la chute, et tu galopes vers la balançoire, quand soudain...

- »Maman, regarde! Un papillon! »

Il est passé devant toi, petit point blanc dans la fraîcheur du matin, il t'a frôlé le nez, brise papillonaire...

Alors tu le cherches des yeux, tu le vois, un peu plus loin sur un brin de bruyère, tu écartes les bras, tu voudrais voler. Raisonnablement, tu te plies en deux, les mains jointes tu te fraies un chemin dans le ciel du papillon, tu chuchotes « petit papillon, petit papillon, viens »

Tu ralentis ton pas rapide, tu trébuches un peu, tu t'arrêtes devant le frémissement d'ailes, ce tremblement qui ressemble à de la peur, qui n'est que le souffle du vent sur un papier de soie.

Il s'envole.

Tu te redresses, lève la tête, plie le cou en arrière, tes cheveux s'emmêlent dans ton col roulé, ta bouche est ouverte, saisie de surprise, ou peut-être est ce de l'attention pour suivre le papillon?

Et tu tentes de ne pas le perdre, tes jambes font des pas de danse sur l'herbe, tu es sur la pointe des pieds, tu cours, tu fais des petits pas, tu agrandis ta course quand tu vois que la fleur qui vole va se perdre loin de tes yeux...

« T'as vu? » me dis-tu avec cette exclamation insistante, les yeux ronds, contente d'avoir contemplé un spectacle rare, la danse du papillon.

Oui, ma brindille, mon herbe folle j'ai vu danser un papillon...




26.3.09

Le Mercredi

Le mercredi c'est promis, on ne réveille pas maman.
Je suis allé voir sur la pointe des pieds si elle dormait. Je suis retourné en courant et en criant à voix basse: "elle doooort".
Alors, j'ai refermé la porte dans mon dos, et nous avons tous les trois mis nos couettes au sol. Ma grande soeur s'est assise et nous a raconté une histoire. Nous, on était dans la housse de notre couette, la couette étant aussi un matelas.
Le mercredi, c'est permis, on s'habille tous seuls. C'est ma soeur qui va chercher nos habits dans les tiroirs.
J'ai quand même choisi ce que je voulais. D'abord, mon tee shirt de pirate, le bleu. Et puis, mon tee shirt de moto, le rouge. Pour que maman ne les voie pas, un tee shirt à manches longues, le rouge et blanc. Et un pull, rouge. On a retrouvé mon pantalon d'été de l'an passé, il m'arrive aux chevilles, mais c'est pas grave, il est rouge. Avec mes chaussons de spitermane, je suis tout pareil, il ne me manque que le masque, celui que j'ai dessiné hier, et dont maman a découpé les yeux.
Ma soeur a mis une robe. Et un pantalon dessous, pour avoir chaud.
On mis la main sur le déguisement de coccinelle aussi, il est parfait pour ma petite soeur. Depuis qu'elle sait mettre son pantalon noir, elle dit qu'elle est le Patman noir. Elle fait comme moi, elle prend son manteau et met sa capuche sur la tête, sans les bras dans les manches, c'est comme une cape. Et on court dans toute la maison, Patman noir contre spitermane rouge.
Le mercredi, c'est biscuits. Sauf que cette fois, on a fait une brioche.
Ce qui est bien aussi, c'est la peinture. On a les feuilles de papa, les devoirs qu'ils n'a pas utilisés, des grandes feuilles, c'est bien pour faire des paysages qui n'existent pas. Je le donne à maman, mais si mémé vient, je dirais à maman qu'elle l'a eu assez et je le reprendrai pour le donner à mémé. Elle les prend en photo de toute façon, mes dessins.
Le mercredi. C'est pour les petits.

Les Non-dits.


Ton ciel est gris ce matin.
Ta fille tousse, trop.
Ton fils renifle.
Tu fais la grimace à chaque fois que tu t'agenouilles.
Tu as les doigts gourds.
Ton dos se plie lentement.
Tu as des valises.
Tes yeux piquent.
Ton cheveux est plat.

Tes parenthèses se font rides, tes rident restent.
Ta peau est molle.
Ton teint pâle.
Tu vois tes rides même quand tu te figes.

Tes seins subissent la pesanteur.
Ton ventre dépasse de ta ceinture.
Tu n'as pas envie de parler.
Tu parles toute seule.
Ton vernis se craquèle.
Tu vieillis.
Mais tu ne le dis pas.
Tu sais que demain, les nuages s'écarteront, ta peau sera mate, ton ventre plat, tes
rides un sourire, tes enfants seront sains, tu seras levée avant eux, tu arrêteras de te plaindre, tu n'auras plus de plaintes.
Tu seras sage.

24.3.09

La petite fille aux yeux clairs

Dans la cour de l'école, les parents se pressaient aux portes des classes de leur enfant. Devant la mienne, je vis une mère attraper sa fille de 4 ans par l'avant bras, la saisissant brutalement, lui criant dans l'oreille des mots que je ne saisis pas tant le débit rapide et mâché par la colère les rendaient inaudibles.
La fillette, jolie avec ses cheveux blonds bouclés et ses yeux bleus, avait la bouche pincée, tirée vers le bas, le regard fixe, se laissait transporter par le bras levé à hauteur d'épaule de sa mère, toute petite il est vrai.
Nous vivions en lotissement, un endroit que l'on espère de passage, les maisons mitoyennes, les ardoises fausses, un jardinet donnant sur la route passante, une haie qui ne parvenait à pousser laissant passer la poussière du parking de la salle des fêtes communale, un hangar d'acier repeint à chaque campagne électorale.
Je reconnus un soir que je me garais devant notre pavillon la mère de famille et sa fille regagnant le leur et je décidais le lendemain de lui proposer de l'emmener à l'école à sa place, pour éviter un trajet somme toute inutile puisque nous étions presque voisins.
Ainsi fut fait.
La petite fille ne souriait pas beaucoup, ne disait jamais ni bonjour, ni merci, elle parlait un peu, mais mal, avec un défaut de langage prononcé. Nous parvenions à la comprendre en la faisant répéter et alors que les autres enfants faisaient silence.
C'était comme un chat sauvage. Elle était laissée libre de surveillance dans le quartier, elle jouait jusqu'à la nuit l'été, dehors, seule, et nous avait dit avoir une télévision et un magnétoscope dans sa chambre pour les jours de pluie.
Elle avait fini par nous adopter, venant parfois prendre le goûter chez nous, accompagnant les enfants au parc les beaux jours.
Cette petite fille sauvage, cette enfant qui s'élevait quasiment toute seule, faisait la loi chez elle. A elle de décider la façon de se vêtir, c'est pourquoi nous la voyions en robe fleurie, celle de sa soeur aînée, en plein mois de février; à elle de dire ce qu'elle prenait au petit déjeuner, elle se retrouvait dans notre voiture, des miettes de pain au chocolat parsemant son pull et la commissure de ses lèvres; à elle de vouloir ou non manger à la cantine, la question je la posais chaque matin, la maîtresse ne sachant plus qui avait dit quoi car la mère venait se plaindre des factures reçues le trimestre suivant.
Enfin, la situation sembla s'améliorer, elle se coiffait le matin, fermait son manteau en hiver, portait des bottes les jours de pluie, son sac de classe était recousu.
Au début, je ne comprenais pas. Ce laisser-aller, cette quasi négligence, ces colères contre l'innocence...je ne voyais pas le crépi jaune devenant gris sous les moisissures, le perron sentant le pipi de chien, le dit chien enchaîné au mur de la maison, le jardin d'herbes nues et pas tondues...
Et puis j'entendis la mère partir travailler à 3 heures du matin, tous les jours, à la distribution des journaux, le père en arrêt de travail à l'hôpital, un fils sans le permis de conduire qu'il fallait emmener à son travail à 20 km de là, des voitures en mauvais état toujours en panne...
Les tours étaient pris, dès que l'une de nous ne pouvait assurer le sien elle pouvait compter sur l'autre, je proposais que la fillette vienne jouer chez nous les jours de visite à l'hôpital, ou quand la voiture ne démarrait pas. Et vice-versa.
Un matin, je mis un CD dans le lecteur de la voiture. Les enfants fredonnaient en se balançant gaiement aux airs Siciliens de Roberto Alagna.
La petite fille aux yeux clairs ne disait rien, elle resta silencieuse, légèrement penchée en avant sur son siège, jusqu'à l'arrivée à l'école, elle restait encore immobile et muette.
Quand je lui posais la question de savoir si elle aimait cette musique, je vis ses sourcils se lever, ses yeux s'agrandir, elle prit une inspiration gardant la bouche fermée et hocha vigoureusement la tête.
Musique Maestro!

20.3.09

Frühling...*


Dans la rue, les gens ont changé d'aspect; les cheveux sont plus brillants, plus longs, le teint clair, parfois lumineux. Quelques femmes ont déjà fait les boutiques pour se vêtir de saison, je vois les plis des tuniques justes sorties de leur emballage, c'est la mode, une tunique sur un pantalon moulant. C'est pratique aussi pour dissimuler les excès de l'hiver en attendant de choisir le régime qui conviendra quand ils afflueront de toute part dans quelques jours. Des jeunes filles, au khôl sans modération, à la boucle d'oreille ostentatoire et au jean taille basse si inconfortable mais qui laisse apparaître un dessous en matière synthétique, pouffent entre elles au passage d'un garçon boutonneux, mais en tee shirt. Elles vont attraper un rhume mais qu'importe, ces premiers beaux jours ne durent pas assez longtemps pour qu'on les snobe ou les ignore.

Assise sur la chaise en bois, dos au soleil pour mieux voir les pages de mon livre, j'ai le cou qui cuit, les aisselles qui ruissellent, les pieds nus. Les bottes en caoutchouc du jardinage sont écroulées sur la terrasse, elles abandonnent, fuient ce soleil confondant.
Les gants verts et de daim marron, sont secs, de la terre de la veille modelés, en position semi fermés, il va falloir les secouer un peu avant de pouvoir les remettre.
Les chats se sont mis à l'ombre, sous la table, une chaise, si je tends la main je peux peut-être les frôler...ils sont étendus sur le côté, tout en longueur, mous.
Dans la maison c'est le silence. La chambre avec des stores est dans le noir depuis le matin, après avoir ouvert en grand l'air du dehors, c'est la pièce restée fraîche pour la sieste de la petite.
Tout à l'heure j'irais fermer les rideaux du salon, en position persienne, nos visages seront en blanc et noirs, zébrés de lumière.
Une lessive de draps de chanvre et de lin attend que je l'étende sur la pelouse, il faudra que je surveille que les chats n'aillent pas y chercher un papillon attiré par ce bleu ciel à terre.
Ponctuellement, un oiseau pépie. Il chante fort, seul, les autres sont en pleine torpeur, ils se sont égosillés le matin déjà. Un jour je saurais peut-être à qui est ce chant.
Il faut que j'aille faire la pâte à pain, et la pâte à pizza. Demain, les cousins viennent, c'est facile une pizza. On sortira les vélos, on ira sur la plage, ou au jardin du château, ils joueront dehors longtemps...
Pour la sieste, j'ai éteins la musique, celle du soleil que j'écoute pour me donner de l'énergie, Cécilia Bartoli qui chante Vivaldi c'est un bijou ciselé, de la virtuosité débridée, un vrai bonheur. Je la laisse s'épandre dans toute la maison, bien trop fort, pas assez, je suis près d'elle alors.
Depuis ce matin c'est le printemps. Cette année, je suis d'accord.

*frühling, c'est printemps en allemand..un des rares mots que j'ai retenu tellement je le trouve beau..il se dit en longueur früüühliiing avec le petit arrêt de la gorge à la fin, c'est comme si on venait de manger un fruit et qu'on claque la langue de contentement.

19.3.09

Deux...déjà!



Il y a un an j'avais écrit ça.

Je ne reviens pas souvent en arrière, le passé ne me sert que pour aller de l'avant.
208 billets. Quelques photos. Des mots.
Mon socle internet m'a beaucoup apporté et m'apporte encore.
Je vous connais en faux, mais aussi en vrai. J'ai passé ma tête à travers l'écran et je vous ai fait la bise ou serré la main, quand je parle de vous je dis Anso, Tartine , Nopilouma ou Marcus, vos pseudos, et mon entourage me dit: qui? alors là, je retrouve vos prénoms, les vrais, enfin presque quand je dis Montoya, c'est pas ça non plus, mais on me comprend...
Non non, je ne dis pas tout, je résume parfois, le net c'est entre vous et moi, ceux qui ne vont pas vous lire ne vous connaissent pas, je crois...
La Vie qu'on Aime, c'est chez moi. Celui qui m'est le plus proche en vrai ne le lit pas.
Ce que j'y mets, c'est chez moi aussi, mais pas toujours vrai. Histoire de brouiller les pistes. Mais au fond, c'est plus moi que jamais sûrement, ne te voile pas la face.
La Vie qu'on Aime au sens large c'est apprendre à faire son pain, le transmettre, c'est voir d'un autre oeil le soleil qui se lève et la marée qui descend, c'est écouter ses enfants et tenter de ne pas oublier, c'est oublier aussi et inventer un peu, c'est garder ses convictions et en changer, c'est chercher à faire autre chose, et le créer, c'est accepter les défaites mais ne pas renoncer, c'est grandir un peu et rester enfant...
Le 18 mars, nous avons sortis les vélos et la carriole, nous avons pêchés quelques coques et palourdes, fait un ou deux trous pour y enterrer des trésors de cailloux...
La Vie comme j'Aime...
Merci à vous de passer par là, de semer des mots, d'échanger, merci de tout.



18.3.09

Chats

J'avais 17 ans à mon premier chat.
Un chat que j'étais allée chercher dans la ferme de Marie-Françoise, avec ma petite soeur qui en choisirait un aussi.
J'ai croisé ses yeux à travers un tas de bûches de bois mises à sécher sous la grange. Ils étaient verts, même pas effrayés car sa cachette ne me permettait pas de l'atteindre. J'avais beau tendre le bras, dans l'espace d'un bout de bois ôté pour mieux la voir, mes doigts à quelques centimètres de son petit museau rose, elle me regardait, impassible. Ainsi donc, avec mon bras écorché, il me faudrait la séduire pour qu'elle se laisse
attraper.
Elle était trop petite pour être séparée de sa mère mais nous ne le savions pas, néophytes en matière de chats.
Ma soeur avait jeté son dévolu sur une petite chatte toute grise, elle non plus pas décidée à nous suivre.
Mon frère fabriqua un piège, avec un bout de bois qui ferait chuter le carton sur le chat à son passage. En vain.
Nous commencions à désespérer, la lassitude nous envahissant avec la chaleur du soleil dans notre dos, nous prenant par surprise, quand soudain, je réussis à saisir l'animal pas plus grand que ma main, et le blottis contre mon coeur, battant aussi fort que le sie
n.
Elle était chaude, douce et soyeuse comme les chatons le sont, avec un poil gris sur fond blanc. Un J était dessiné sur son pelage, je décidai de l'appeler Jazzy.
Nous rentrâmes avec les deux chattes, la grise et la bicolore, fières, heureuses, excitées, responsables d'une vie de chat.
Jazzy fut mise dans ma chambre, je lui installai une litière dans le bas de mon placard-salle de bain, avec un bol de croquettes pour chatons et de l'eau.
Elle était apeurée, mais le soir, dans la nuit, je la sentis monter sur mon lit et s'approcher de ma tête.
Immobile, je la laissais s'installer sur mes cheveux, elle y fit comme un nid contre mon
cou, se pelotonna et se mit à téter goulûment ma boucle d'oreille, une perle de culture. Elle m'avait adoptée, elle fut ma compagne une douzaine d'années.
Un soir, je rentrais de l'agence où je travaillais, dans le gîte que nous avions loué pour une période hors saison en attendant de trouver un appartement. En ouvrant la porte, je vis mon chat, ma Jazzy couchée sur un de mes pulls qu'elle avait descendu de l'étage, pur le poser juste à l'entrée, elle dessus, mourante. Je ne comprenais pas, j'étais affolée, je partis chercher sa caisse pour l'emporter chez le vétérinaire, mais il était visiblement trop tard, alors je la caressais en pleurant, émue de voir ce que son attachement l'avait poussée à faire, attendre que je rentre, allongée sur un vêtement
que je portais souvent. Elle mourût quelques minutes plus tard.
Je me souvins de toutes les fois où nous partions en balade, la chatte à nos basques, nous suivant comme un chien le ferait, de sa chute du deuxième étage d'un autre appartement qui la dégoûta des hauteurs pendant quelques semaines, de ses puces, de ses crottes qu'elle dissimulait très intelligemment, de ses coups de langues sur mon oreille, toujours la même, de ses morsures sur mes mains en jouant, des ses griffes qu'elle ne sortait jamais contre nous, de la tapisserie déchirée, de sa façon de se poser dans le cercle de lumière de ma lampe de bureau ou sur la feuille blanche posée sur ce même bureau.

Je me retrouvais seule le lendemain soir, le gîte silencieux, sans le bruit des coussinets ou le miaulement de faim de l'animal, si discret, si présent, absent définitivement.
Et je courus chez le vétérinaire pour trouver une adresse de quelqu'un ayant des chats à donner.
Ainsi vint Léo, the Cat.
Léo the cat, chatte à ses heures, a eu plusieurs portées depuis que la vie à la campagne nous héberge.

L'une d'elle s'est faite sans nous, dehors, in the garden, et nous ne vîmes les objets du délit que bien trop tard pour les attraper.
Oui, encore.
Hier, alors que la décision de faire quelque chose s'imposait, ces chats là ayant bientôt un an, ces chats là venant parader devant nos fenêtres à monter leurs beaux minois et leurs poils splendides, se laissaient caresser uniquement par moi, uniquement à l'heure des repas.
Hier je me mis au soleil, comme un chat. Ma présence se faisant discrète, non menaçante, je tendis la main vers l'un d'eux, le blanc avec un masque noir et des poils
à en faire des noeuds.
Il se laissa faire. J'insistai alors, continuant à enfouir ma main dans son pelage noueux, grattant entre ses oreilles, derrière sa tête, il en oubliait de s'enfuir...plus tard dans l'après midi, il vint se frotter à mes jambes, et je l'entendis ronronner.
C'est bien.
Pouvoir savoir qui est chat et chatte, leur faire un planning familial pour que la population féline ne dépasse pas la population humaine.
Pouvoir les garder ces chats, les laisser courir sur la terrasse, sauter sur les papillons, les moustiques, se cogner contre la vitre, faire des trous à la recherche des mulots qu'ils nous ramènent en nombre chaque hiver...

Ces chats qui nous gouvernent.

15.3.09

Orange, planète étrange...

Sa messagerie Orange ne marchait plus. Elle avait un message d'erreur qui lui disait que la panne était momentanée, qu'il fallait renouveler ultérieurement l'opération.
Au bout de quatre jours, elle n'avait pas envie d'opérer, ni d'être opérée, ni ultérieurement ni immédiatement, elle se résolu enfin à joindre la boite vocale 24/24, un dimanche après midi, tant pis, vengeance, en plus il faisait un temps de rêve.
Pour une fois l'attente estimée à moins de deux minutes, dura moins de 2 minutes, tout le monde étant à la plage.
L'homme machine ( celui qui a des questions, toutes faites, toutes prêtes et les réponses adéquates à tout) à l'autre bout de la ligne, avait un accent qu'elle situait aux frontières asiatiques plutôt qu'Atlantique ouest. Se disant que finalement elle pouvait se croire au soleil malgré tout, elle s'expliqua:
-"Je n'ai plus accès à la messagerie de votre réseau depuis quatre jours. Je peux voir que j'ai 28 messages à lire, mais je ne peux ni les lire ni envoyer d'appels au secours par mail.
-Oui, madame, pouvez vous me donner un numéro de portable où appeler au cas ou la communication serait coupée?
-Non, mon portable ne capte pas ici.
-Celui de votre ligne télécom?
-Non, elle n'est pas reliée à un téléphone
-Bon, celui de votre téléphone internet alors?
-Oui...09...
-Pouvez vous me préciser madame ce que vous voyez quand vous ouvrez votre boite mail?
-Je ne peux pas ouvrir ma boite mail.
-Avez vous essayé madame de le faire à partir d'un autre ordinateur?
-Non. Chériiii, tu peux essayer pour moi? mon mot de passe c'est "cehry".
non, ça ne marche pas.
-Je vais vous faire patienter un moment madame.
-Oui.
5 mn de musique et message de patience et de pub...
-Madame?
-Ouiii!
-Je vous remercie infiniment de votre patience et de votre compréhension mais pouvez vous me lire le message d'erreur?
-Oui: blabla.
-Je vois. Madame?
-Oui.
-Je vais vous faire patienter un moment, je dois faire intervenir un technicien.
5 mn.
-Madame?
-mm
-Je vous remercie infiniment de votre patience et de votre compréhension, mais nous devons fixer un rendez vous téléphonique avec un technicien. Pouvez vous me donner votre numéro de portable?
-mmm non. Il ne capte pas. Le 09.
-Oui. le technicien peut vous appeler à partir de 17 h ou 18h ou 20h?
-Non, il fait beau, je ne vais pas rester...
-Il fait beau?
Gardez votre coeur bien au chaud madame..
Rire niais et incrédule de la fille. gnn. quatrième dimension, elle ne sait plus que répondre la question n'avait pas été paramétrée!
-Demain madame?
Demain quoi? qu'est ce que c'est que cette question? on est enregistrés là? c'est dimanche tout est permis, c'est "téléphone surprise"?
-Euh oui, oui...à partir de 9h15.
-Il fera beau madame?
Qu'est ce que je dois répondre, non, j'habite au pôle nord?
-Oui, bien sur il fera beau!
-Vous désirez autre chose madame?
C'est ça, mon numéro de téléphone tu l'as déjà!
-Euh, non, non, si mon problème est résolu ce sera bien, merci.
-Très bonne journée madame, à bientôt avec votre serveur préféré.

11.3.09

i-mythe moi, si tu i-crois.

Elle est brune aux yeux verts, mesure presque 1,70 mètres, porte du 38 et un bonnet B...
Elle tchate avec des hommes, elle tchate avec des femmes, elle se raconte, on lui confie, on l'aime...
Ses amis sont au nombre de...(elle va vérifier, elle a la mémoire courte, ou bien le nombre change souvent) ...donc 89...ah oui, c'est beaucoup se dit-elle.
On la pense sophistiquée ou naturelle, belle c'est sûr avec tout ce qu'elle sait faire, elle les trouve tous gentils et beau, oui, quand on aime on est aveugle...
Elle admire nombre d'entre eux, tellement que souvent elle ne sait pas le leur dire, elle ne laisse pas de commentaires, ou si peu, quand on a rien à dire ou que des âneries...
Elle a un bureau blanc et immaculé, une machine à café espresso, son organisation est sans faille, femme d'entreprise...elle assume son autonomie, sait se servir d'un marteau ou d'une visseuse, il lui est même arrivé de changer une bouteille de gaz, elle ne s'est pas encore attaqué à un pneu, mais elle en sait plus que tous les mâles de la famille sur les codes HTML, geek, widgets et autres amusements i-diots.
En vrai ...
En vrai, son bureau est un vrai foutoir, sa corbeille à linge déborde sur le lit et le plancher, elle met ses enfants devant la télé pour pouvoir tchater en paix, elle a un bouton sur le front, ne porte jamais de marque, est toujours en jeans, ceux du supermarché, a de la boue sur ses bottines, ne se lave qu'un jour sur deux, ne se rase pas, ne s'épile pas, ses amis sont au nombre de ... 10, peut-être, elle trouve tous les autres un peu cons, son 38 s'élargit en 40 les mauvais jours, son bonnet B..ah bon, B?
Alors, pour se regarder dans la glace et voir son reflet, elle met son écran en noir, ça cache son bouton et ses rides, elle ne voit plus que le double menton...
Femme Fatale, i-reelle.

8.3.09

Femme


Tu l'as mangée goulûment tu te repais de ce goût juteux et frais, la pomme.
Tu es le vice incarné, puisque tu corromps l'homme, ce saint innocent, aveugle.
Tu as la jambe légère et longue, qui dévoile parfois la fleur du mal, pour ce mâle que tu domines, aussi.
Tu es la chose petite qui se fait souris dans l'antre masculine ce fort imprenable aux pieds d'argile.
Tu pépies, tu jacasses, tu saoules de cette voix perchée tous ceux qui t'entourent, mais tu envoûtes aussi, la voix rauque, brisée par le désir ou qui chuchote des secrets inavouables.
Tu as le droit de vote.
Tes seins te font le profil martial, fier et haut, ton ventre rond se fait moelleux au doux repos du guerrier, ta fesse charnue se pose comme elle veut.
Tu peux encore décider de la vie comme de la mort.
Tu fais croire, tu mens, tu racontes, tu inventes, tu vis, tu pleures, tu réfugies, tu fais fuir, tu en impose, mais tu as peur.
Tu cherches à comprendre, à savoir, à diriger, à changer, mais tu restes sur ta faim muette, stupéfaite, tu hais la bêtise.
Ils ne comprennent rien, et c'est tant mieux.
Tu t'adaptes, comme tu aimes, tu acceptes, comme tu aimes, tu aimes, avec passion, tu absous comme un pardon, tu oublies, pour la confiance.
Femme tu es de tout, faite de petits riens, indispensable, méconnaissable, et après?
On t'as donné le nom de Terre.
On t'as faite Nature.
Tu peux être Mère.
Tu es une idée, un mythe.
Tu es comme Lui, mais il n'est pas comme toi.
Je vais faire à manger, changer les couches, mettre le linge à laver, aller travailler, exiger une augmentation, lire des livres, manger du chocolat, éteindre la télé, écouter avant de parler, me taire, repasser, encore, faire l'amour, le donner, en prendre, le recevoir, expliquer, partager, faire croire, décider, partir, rester, promettre.
Elle n'en n'a pas fini d'être une femme.

2.3.09

Horizon

Allez donc voir là si j'y suis!

Et puis voilà, je l'édite ici aussi!

"Quand je me suis réveillé ce matin, elle n'était plus là.
Je ne sentais même plus la chaleur de son corps sur le drap froissé et la chambre était dans le noir, elle n'avait pas non plus ouvert les volets.
Hier soir, nous nous sommes disputés. Elle n'ouvrait pas la bouche, je ne pouvais pas lui faire dire ce qui causait son mutisme, son regard était noir comme son humeur.
Je me suis couché, j'ai posé ma main sur sa hanche dressée comme un rempart et je me suis endormi.

Mon sac est prêt. Il s'est endormi, sans même me parler. Il me tourne le dos, ignorant. Je n'arrive pas à lui faire comprendre que cette ville m'insupporte, assez de ces immeubles qui touchent le ciel gris, assez de ce bruit sourd et continu des voitures, assez de sursauter au passage d'un deux-roues sans silencieux, vanité de gamin, crispation de mes mâchoires. Je partirai dans quelques heures, le taxi m'attendra en bas de la troisième avenue, il ne se rendra compte de rien.
Depuis des semaines l'envie de fuir me ronge, cet avenir sans horizon me pèse, partout les yeux se posent sur un obstacle, il est facile à l'esprit de se confiner de la même façon. C'est ce qui nous est arrivé, comme à d'autres.

J'ai trouvé sa tasse de café dans l'évier. Elle s'est levée tôt, en général je le fais avant elle. Ses clés du bureau son restées là, son portable est sur messagerie, sa veste en cuir ?
Son absence à mon réveil est comme un mauvais présage, je tourne dans l'appartement comme le faisait notre chat avant qu'il ne tombe du 15ème étage et ne se brise la colonne. Elle ne s'est pas remise de cette perte je le sais. Nous ne voulons pas d'enfants. C'est ce contrat qui nous unit depuis des années, de toute façon c'est trop tard, je suis trop vieux. Il nous suffit de voir nos nombreux neveux et nièces pour ne rien regretter ; leurs hurlements dans les couloirs de la maison familiale, leurs caprices, les sacrifices consentis dès leur naissance, je ne veux pas les accepter, elle non plus.

Tout à coup je me rappelle cette fillette hier après midi, qui se jetait en riant sur la balançoire et un sentiment confus me frôle. J'ai 41 ans, et après ? Rien.
Se rapprocher de ses racines, retrouver la route de chez soi, c'est comme sentir le goût de la confiture de mirabelles, la brûlure du soleil sur son dos, les grains de sable entre les orteils en enfilant des espadrilles rouges, le baiser salé de son premier amour...
Je suis arrivée sur la plage de mon enfance. Le soleil est prêt de se coucher. Je suis seule, l'hiver dépeuple les arbres et le sable, c'est bien. Aucune brise ne soulève mes cheveux, aucun immeuble ne barre la vue d'un astre se plongeant dans l'onde claire. J'enlève mes lunettes de soleil, je veux me brûler les yeux, pour m'aveugler de cette lumière."