Aplati sur un tatami, il essayait de le soulever. Impossible. La sangsue collée au sol bleu, pesait un poids mort, personne n'aurait pu, sauf s'il le voulait. C'est la première vision du judo que j'ai. Cette faculté de maîtriser son corps, en faire la matière dont chaque particule se contrôle et empêche tout contrôle d'un autre.
J'ai tenté à dix ans, puis je me suis tournée vers le karaté. Pour quelques petites années. J'ai tout oublié sauf le premier kata qu'un gamin de six ans saurait faire mieux que moi.
Parfois, on retrouve des histoires en ouvrant les malles. Les kimonos que me tendaient ma mère, nous appartenaient à mon frère et à moi. Je touchais avec émotion le tissu crème, épais, au tissage serré. Ceux-là seront peut-être à la taille de mon fils, disions-nous.
La veste porte un petit carré cousu à l'angle droit du revers. Il dit "Choses, Saint-Pierre, Réunion". Avec un dessin de deux judokas ou karatékas. "Choses", c'était le magasin où les kimonos ont été achetés. Je ne sais pas s'il existe encore. Mais le passage de ces kimonos à mon fils prouve qu'il en reste quelque chose.
A genoux, sur la scène avec ses 119 autres compagnons, il attend. Fier. Il essaie de ne pas sourire, mais ses fossettes le trahissent. Et puis, il reçoit sa nouvelle ceinture. Une blanche et jaune. Il salue. Il sourit, franchement.
Il est beau.
Moi aussi je faisais du judo petite, mais j'ai préféré que mon fils fasse de l'athlétisme et de la natation car ne nous voilons pas la face, le tatami, ça sent les pieds.
RépondreSupprimerC'était ma poétique contribution affreuse sale et méchante.
J'adore :-). Et je t'ai lue à l'homme. Il y avait deux dindes au lit ce matin .
RépondreSupprimerMoi ce sont mes livres.. et mes bd..
RépondreSupprimerCela fait tout chose ce temps qui file.
Ils ont tenté le sport. Franchement ça fait quatre ans qu'on s'éclate tous à faire de la musique. L'année prochaine l'orchestration va d'ailleurs être symphonique mais on s'éclate tellement plus. C'est notre kif. ;)
RépondreSupprimerL'aîné après une année de danse au Conservatoire (il était doué) s'est rangé à l'index de ses peitis copains, il a arrêté pour faire un peu de Tea-Kwondo.
RépondreSupprimerMais la vraie réussite des trois, ça a été la musique, et les voir tous les trois jouer dans l'orchestre des jeunes, c'est encore un souvenir vivace pour moi.
Ce que j'ai transmis à ma fille, c'est ma collection de violons, le dernier étant un violon construit de mes mains quand j'étais luthier. Je te dis pas la fierté de la gamine ! Et du père !
Charles, les livres aussi :-)
RépondreSupprimerCaro.carito, oui, la musique,, c'est une chose formidable que de pouvoir partager ça! On a envie d'apprendre chacun un instrument aussi, pour le faire. Cette année, notre grande devrait commencer un apprentissage, nous verrons...
Philémon, pour moi, luthier, c'est un métier qui est plus qu'un métier. Je veux dire, doit-on vraiment dire "quand j'étais luthier"? ne l'es-tu pas encore? même sans "exercer", c'est avant tout un savoir-faire, non? Alors, oui, je comprends votre fierté :-). C'est beau!
Le savoir-faire est tellement tributaire de la pratique. J'ai sans doute perdu la main, le geste s'entretient toujours. Et l'arthrose me tord un peu les mains, je ne pense plus pouvoir fabriquer un violon aujourd'hui, même si j'ai gardé tous les outils pour le faire.
RépondreSupprimerMais je n'ai pas de nostalgie pour ce métier, et aujourd'hui, je me tournerais volontiers vers la charpente navale, j'attends d'avoir suffisamment avancé la rénovation de la maison pour mettre en chantier une plate gréée, pour retrouver les si belles sensations du travail du bois.
Je vois un grand garçon d'une trentaine d'année passée. C'est à Paris dans un immense dojo. Tout le ban et l'arrière-ban du judo européen est présent. Son nom vient d'être annoncé. Il enlève sa ceinture noire pour recevoir sa ceinture rouge et blanche. Il essaie de ne pas sourire, mais ses fossettes le trahissent. Toi tu es assise dans les gradins avec le public, dans les tout premiers rangs, avec toi il y a aussi sa femme avec leurs deux garçons. Tu verses une larme en pensant à une autre ceinture, celle de son premier grade. Alors le vieil homme assis juste derrière toi se rapproche et chuchote par dessus ton épaule : "Hé hé, Tu te souviens que j'avais déjà écrit tout ça sur ton blog ?"
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