17.3.11

Oh when the Saints...

...go marching in...
Je n'en connais qu'un de Patrick. Et je ne me souviens que d'une seule Saint-Patrick que j'aurais fêtée. Rire. Danser. Ces trucs qui te mettent en joie, qui te démangent les doigts, les pieds.
C'était les années 90's. Je vivais dans une ville où déjà les panneaux étaient bilingues et les salles de classe aussi. Une ville vieille, pleine de charme, une ville de pavés, mais bien trop bourgeoise pour y trouver la moindre plage en dessous.
C'était après les cours.
Je n'aimais pas l'école. (Comme je regrette qu'on aime pas l'école dans ce pays, alors que c'est si bon d'apprendre). Chaque fin de journée, avec mon amie, on rentrait en général chez nous, l'une en voiture, l'autre en bus. On traversait la ville jusqu'au point de rendez-vous. "Traverser la ville". Tu pourrais croire qu'elle était grande, mais en fait non, toute petite. Dix minutes pour rejoindre l'arrêt de bus. Sauf quand on faisait un arrêt boulangerie, et qu'on se mettait plein les lèvres de sucre de beignet aux pommes, un truc que je n'arrive même plus à manger aujourd'hui tellement le sucre.
Parfois, on avait plus de temps, soit par autorisation parentale, soit parce qu'on en avait décidé ainsi. Alors, on allait au Café Le Bretagne. Celui des quais. Il y régnait une ambiance immuable. On s'asseyait soit près des fenêtres pour regarder les passants, soit plus au fond.
C'était un endroit qu'on aimait bien, comme des ados s'approprient un endroit à eux. On buvait un chocolat chaud avec de la crème fouettée. A l'époque, je ne buvais pas de café.
Un soir, il y a eu la Saint-Patrick.
On est restées en ville ma copine et moi, un soir avec autorisation parentale. On se baladait. C'était un 17 mars sûrement, puisque.
Nos pas nous ont conduit naturellement à notre café.
Mais il n'avait plus rien à voir avec le café sage de l'après-midi. On nous l'avait changé. Plus un seul gamin, plus une seule bourgeoise en vison.
C'était un café joyeux, un café vivant, où se mêlaient rires et chansons, bruits d'instruments inconnus pour un plaisir contagieux.
On a trouvé une place. On se calait les uns contre les autres, et on regardait ce concert comme improvisé, sans scène ni projecteurs, juste des musiciens prometteurs.
C'est là que j'ai eu la confirmation que j'aimais les percussions. En dehors d'un concert dans la cathédrale, le Requiem de Mozart, où j'avais été subjuguée par les cymbales monstrueuses, et puis les concerts de Jazz, avec les chtong de la contrebasse, je n'avais pas souvent été mise en contact avec les vibrations de ces instruments à peau.
Le Bodhràn. Le type le tenait à l'avant-bras, et son autre main tenait le sticker entre le pouce et l'index. Il jouait magnifiquement à une vitesse si folle que le sticker en était flou. C'était magique. Je crois que les pulsations du sang trouvaient leur rythme dans la peau du Bodhràn. Je battais fort. Il vibrait puissant.
Il y avait un violon. Bien sûr. On ne parle pas de musique irlandaise sans violon, si?
Je dois être bon public, mais j'étais presque en transe.
Les concerts, en vrai, même si le son n'est pas aussi parfait (trop parfait?) que sur un disque, c'est une dimension supplémentaire. Un plaisir qui passe de fibre en fibre et qui se multiplie à l'infini du nombre des spectateurs. Je crois bien aussi que le-dit spectateur est acteur. D'ailleurs, nous tapions des pieds, nous battions des mains, nous n'étions pas statiques, et c'était bien.
Il y a des soirs comme ceux-là, où le temps se doit d'être élastique. Il y a des moments magiques qu'on oublie pas. Le sait-on seulement à l'instant où on les vit?
Tiens, comme ce matin dans la salle d'attente...non, je te raconterai plus tard, si j'y pense.

5 commentaires:

  1. merci de nous proposer autres choses que le gris très gris nuage qui nous menace. J'avais besoin de ta musique.

    RépondreSupprimer
  2. Le spectateur/auditeur est aussi acteur de la musique, je suis bien d'accord. Comme le lecteur fait partie du livre.
    Et j'ignorais qu'on rencontrait des bourgeoises en vison dans les rue de Kemper.

    RépondreSupprimer
  3. Moukmouk, c'est vrai qu'on a besoin de musique. Ça ne résoud rien, mais ça aide.
    Phil, :-), comment? tu ne connais pas les bourgeoises de Kemper? mais saches qu'à 13 ans elles portent déjà des colliers de perles et des carrés Hermès! si, si! m'enfin, c'était peut-être des faux carrés.

    RépondreSupprimer
  4. Très belle histoire Tifenn ! J'aime beaucoup ces moments où musiciens et spectateurs ne font plus qu'un, unis par la musique qui traverse les corps et la tête.
    Bonne fête aux Patrick !

    RépondreSupprimer
  5. Oui, mais quel Patrick !
    Les instruments à peau, les percussions, c'est depuis toujours ce qui conduit aux transes.
    L'an prochain, si tu as l'autorisation maritale ;-D, je te donne une seconde chance !

    RépondreSupprimer

Un petit mot n'est jamais si petit.

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.