Ça a commencé comme une phrase qu'on lance à la volée, légère, qui ne porte pas à conséquence : "Tu devrais venir assister à la réunion que la mairie organise à la mi-décembre...ils invitent les artistes amateurs pour un projet au printemps..."
C'était donc un soir bien noir, bien froid, pour la première fois j'entrais dans la salle du conseil municipal, grandes tables rassemblées en une seule immense table, une bonne vingtaine de personnes, deux connues de moi seulement, j'étais juste curieuse. Un peu excitée aussi.
Le chargé de la culture a dit son étonnement de nous voir si nombreux. Et puis, il a aussi dit, "vous êtes là donc pour exposer vos oeuvres". Je pensais, oui, bon, c'est juste une réunion d'information...
Mais nous avons fait un tour de table, il a fallu se présenter, parler de ce qu'on faisait, puisqu'on était là...
Il n'y avait donc pas que des amateurs. Il y avait des professionnels ou des amateurs avec "de la bouteille". Je crois qu'on était deux ou trois à n'avoir jamais exposé. J'ai dit "je fais des photos".
On a trinqué au cidre, au projet du printemps.
Il y a eu une deuxième réunion, puis une troisième. Il a fallu donner un nombre de grilles à réserver.
Je pensais encore, oui, bon, j'ai des photos en stock, j'ai le temps.
C'est le genre d'objectif qui reste en tête. Qui, même quand les mains ne font rien, continue de grandir dans la tête, évolue, vire à gauche, à droite, s'ensevelit, ressuscite.
Je commençais à avoir une idée. Un truc un peu flou. Une ligne directrice.
Tout en gardant à l'esprit que je pouvais continuer de faire des photos, tomber sur une occasion, un petit quelque chose qui pourrait me faire changer encore de sens.
Et puis, cette pneumonie qui m'a privée des vacances avec les enfants et d'autant d'occasion de photos dans la nature, les balades sur la côte, le sable fin des Abers, et celui, grossier, de la Ria.
Il me restait quinze jours.
Il faut savoir que je n'avais jamais imprimé mes photos sur papier. Enfin, parfois avec l'imprimante maison.
Je me lasse vite de mes images. La photo est faite, elle a une durée de vie variable dans ma mémoire, à force de les voir, je ne peux plus les voir. Et puis, je remarque surtout leurs défauts.
On fait des photos, des tas de photos, en théorie on progresse, on évolue. On change de technique, on évite les erreurs au bout du dixième plantage. On rechute.
Il faut, pour que je les aime à nouveau, que je les oublie. Ou bien, qu'elles remplissent leur utilité première, ma rappeler une émotion, un instant de ma vie que j'ai voulu impressionner dans le labyrinthe de mes souvenirs. La main d'un enfant qui me tend un coquillage. Une fleur dans un champ, un soir d'été.
Je n'avais que quinze jours, j'étais fatiguée de mon indisposition passagère et pourtant, je voulais du neuf, partir de rien, de zéro.
Faire des photos pour les exposer, ce n'est pas le même geste que de faire une photo pour un souvenir.
Je n'avais ni le temps, ni beau temps pour parcourir les chemins. Il ne me restait que le solution de ce que j'avais sous la main. Un fruit, une noix, une pâte à tarte, des mains.
Et puis mon nouveau jouet.
J'apprends tous les jours de lui.
En quinze jours, j'ai fait plus de six cents photos. C'est effrayant quand on y pense.
Je posais sur un pied, je changeais l'exposition, l'ouverture, le retardateur... la position, le cadrage...
Et puis, un matin je suis allée voir un photographe. Un vrai. Enfin, un qui vend du matériel photo et qui imprime. Parce que les portraits mariage et bobines floutées de gamin pour qu'ils soient beaux, j'aime moyen.
J'ai découvert le coût d'une photo. Comme avant. Au temps de l'argentique.
J'ai réalisé aussi que mon écran d'ordinateur est flatteur pour mes couleurs. Une fois imprimées, elles sont "plates". Va falloir que j'étalonne (mais je ne sais pas comment) l'écran.
Ensuite, il y a eu une matinée à faire le tour des "soldeurs" pour trouver des cadres. Parce que parfois on trouve des images (superbes!) déjà encadrées, moins chères qu'un cadre nu.
Alors, il a aussi fallu adapter la dimension de mes photos à ces cadres.
Ainsi, pour faire une expo, il faut des sous, plein, ou de la débrouille. Ou accepter de ne pas faire "exactement" ce que tu voudrais faire.
Ma dernière photo exploitable date de ce matin. Mais, l'imprimeur (celles en noir et blanc finalement, elles sont allées aussi chez l'imprimeur) l'a complètement ratée. Pas le temps de recommencer ou d'aller encore chez le photographe.
Je suis partie du thème "culinaire" mais j'ai aussi mis deux, trois photos "classiques".
Trois formats de photos, 30/30, 24/30 et 20/30. J'aime le format carré.
Des gros plans, des paysages, des fleurs. De la couleur (peu) et du noir et blanc. J'aime le noir et blanc.
Quatorze photos. Je ne pense pas qu'elles prendront trop de place dans la chapelle, où nous serons finalement quatre à exposer. J'espère que tout va rentrer, et que tout le monde respectera la place des autres.
C'est aussi ça, l'expo, la diplomatie. Parce qu'il existe quelques tensions, entre les gens "du cru" et nous les "pas d'ici". On était trois "pas d'ici" à exposer à la chapelle et un quatrième "du cru" s'est "inscrit" depuis trois jours. C'est moi qui ai les clés, et c'est moi qui suis "l'interlocuteur" qui transmet.
Demain, on dégage les bancs de la chapelle.
On voit l'espace qui sera disponible.
Je gère mon espace et celui de mon voisin qui ne sera pas là.
Samedi matin, on fignole, ça m'étonnerait que tout soit réglé vendredi soir.
Et samedi après midi, c'est parti!
J'avoue n'avoir aucun recul. Aucune idée. J'ai appris beaucoup ces derniers jours sur les "possibles" photos. C'est comme de pousser une porte et d'entrevoir une pièce qu'on devine très grande. Si je n'avais pas eu cette envie, ce projet, j'aurais mis plus de temps à parvenir où j'en suis aujourd'hui.
Et puis.
Et puis, pour une fois, j'ai mené à terme un travail. Même s'il ne correspond pas tout à fait à ce que je voulais, j'ai fait ce que j'ai pu, avec les moyens que j'avais, autant financiers que temporels et "intellectuels".
Je suis contente. Oui, je suis contente de l'avoir commencé, poursuivi, et fini. De A à Z.
C'est peut-être un début.
En tout cas, c'est une étape.
J'expose cette photo là, dans ce cadre là, et cette chapelle là. Celle de Saint-Jean.
cette photo est intrigante..déjà !!
RépondreSupprimerC'est un parcours. Encore bien des découvertes durant la fin de semaine ....C'est la vie qui avance ! Pa dam Pa dam...Bravo.
Mais c'est super comme aventure. Créer une série, reprendre sont travail avec l’œil du débutant pour chercher les interconnections !
RépondreSupprimerSi tu veux je peux te donner le nom d'un logiciel qui étalonne les écrans, c'est en effet assez troublant comme résultat.
Dis tu nous feras une expo virtuelle après l'expo de la chapelle ?
Bon vernissage cet aprem !
pa dam pa dam..
RépondreSupprimermoi aussi je chantonne..
et t'envoie le soleil du sud pour te soutenir.
Ella, vent et froid...du monde chaque instant...mes photos ne sont pas nombreuses dans le lot, je ne sais pas si elles plaisent, en tout cas, il y a beaucoup de vrais bons artistes ce WE!
RépondreSupprimerTanakia, oui, le logiciel m'interesse, c'est vraiment autre chose sur papier :-) et puis, pour le travail, je crois que j'en ai encore!! :-)
Charles, ben, il est où ton soleil? demain? pour le temps d'arriver?
oH la belle histoire... et elle n'est pas finie.
RépondreSupprimerOh, je suis si contente que tu sois contente, que tu sois allée au bout de ton beau projet.... que tu aies exposé, que tu te sois exposée....
RépondreSupprimerTu sais que tu m'as donné envie d'exposer... ?
RépondreSupprimerQui sait peut être je vais me lancer...
J'aimerai bien voir ton expo, je l'aime déjà !
Bises Tifenn