21.5.11

Ambiance (l'après-midi)

Ambiance (le premier est sur tumblr, oui, je sais que je ne simplifie pas les choses).


Ainsi donc, j'ai un peu la chair de poule au contact de l'air frais qui entre dans l'ombre du salon.
Je parle beaucoup de poils décidément dans ces ambiances, se peut-il que mon premier contact avec la vie soit révélé par ma réaction pilositaire? poilesque? comment dit-on?
Bref, je frissonne alors que dehors le soleil cogne.
Le chat de la maisonnée appelle de son gloussement de gorge ses chatons, que nous tentons de laisser dehors, sur ou sous la terrasse, à eux de voir, le temps de leur apprentissage de la propreté. Mes chatons à moi étant encore au stade éducatif de celle-ci depuis 9 ans. (Quant à la mienne, elle est restée au stade larvaire, avec parfois un sursaut lorsque du monde vient à passer, et avec mon activité c'est tous les jours, imaginez mon désarroi).
La baie vitrée est grande ouverte, ce serait dommage en effet de ne pas profiter de ce printemps torride, un samedi après-midi quiet, alors que ce soir, nous n'avons personne de prévu.
Sur le fil à linge néanmoins, sèche une couette à plumes, et de grandes serviettes de bain bleues. C'est fête pour le linge, il sera rêche comme j'aime, parfumé de pollens, comme j'aime moins, et écolo, comme j'adore.
Parler du linge, je te jure, en voilà un sujet intéressant.
Non, imagine plutôt que non loin de ce vol au vent d'un drap qui claque, un hamac brésilien de belle facture et de bons amis, s'accroche aux eucalyptus quinquennaux, comme si on avait planifié ce hamac un jour, et que deux pieds en dépassent. Ceux de grande fille. A l'opposé des pieds, un coin de livre, une bande dessinée semble t-il.
Quelles aventures lit-elle? Celles d'un chevalier Ardent qui me faisaient rêver petite? ou bien Blutch et Chesterfield? Entend-elle l'oiseau lancer sa trille? Rien n'est moins sûr, car deux maisons plus loin, un voisin s'entraîne.
A vrai dire, notre maison est entourée de Bruits du Samedi. 
Le plus courant est celui d'une tondeuse, mais vu la taille des jardin ici, il arrive que ce soit de ces petits tracteurs, que les enfants prennent pour apprendre à conduire.
C'est qu'à la campagne, on sait bien qu'on ne tond pas le dimanche. Enfin, on essaye. Les autres jours, on travaille. Alors les samedis bruissent de moteurs en tout genre.
Et l'odeur s'élève, prégnante, celle de l'herbe fraîchement coupée. 
Moi, je ne tond pas, notre engin est lourd, notre jardin est tout sauf en angles droits, et lignes régulières, loin des pelouses de Wimbledon, il faut onduler, bifurquer, virer à droite comme à gauche, et vraiment, j'y passerais de trop longues heures pour ne pas finir par tout raser, de lassitude. Je l'ai fait avec l'ancienne tondeuse pourtant (pas raser, mais la passer), un petit machin tout léger, et ce jour-là, je portais ma dernière fille sur le dos. Elle n'avait pas un an, et l'écharpe était en sac à dos. J'ai senti rapidement la tête enfantine dodeliner et finalement se poser avec un petit poc, sur le haut de mon dos, entre mes deux omoplates. Elle a dormi comme une bienheureuse, et je ne pouvais cesser le bruit de la tondeuse de peur de la réveiller. N'est on pas prêt à tous les sacrifices pour que l'enfant dorme?
L'autre bruit qu'on entend, concurrence celui de la grosse tondeuse du voisin de gauche.
Ici, c'est la Bretagne. Qui dit Bretagne dit identité. Si vous en savez un tant soit peu sur la culture bretonne, vous savez aussi qu'il est impossible de passer à côté de la culture musicale. Et dans ce pays-ci, tout particulièrement, des pointures. En fait, si tu veux faire du piano ou de la flûte traversière, passe ton chemin, tu ne trouveras point.
A vrai dire, au bout de ma route, celui qui a écrit ceci, vit :


"Les pommiers fleuris du printemps
Et la grêle de temps en temps
Sur les talus la blanche épine
La tige fine qui s'incline
Les ajoncs de La Roche-Bernard
Beauté prise dans un regard


Par chance et aussi par vouloir
Je dors en Bretagne ce soir


L'abeille sur le liseron blanc
Et en surface d'océan
L'évanouissement des vagues
L'ombre d'un chemin qui zigzague
La graine des genêts craquant
En plein midi au bord des champs


Par chance et aussi par vouloir
Je dors en Bretagne ce soir


Les bruines de l'arrière-saison
Voilant des ports sans horizon
Une sirène qui résonne
Portant mélancolie d'automne
Le galop fou du vent salé
Sur l'infini des monts d'Arrée


Par chance et aussi par vouloir
Je dors en Bretagne ce soir


L'onglet du pecheur étripant
Le poisson sur le pont glissant
L'alignement mégalithique
Que fait reluire la pluie oblique
Et un peu de neige parfois
Qui blanchit l'ardoise des toits


Par chance et aussi par vouloir
Je dors en Bretagne ce soir


Dans la beauté"


Alors, tu devines bien ce que l'air entraîne jusqu'aux demeures les plus sombres et les plus lointaines, les plus lumineuses et les plus proches?
Un air de biniou sinon rien.
J'aime la volatilité de cette musique aérienne d'un samedi de mai. Elle arrive et s'échappe, frivole et joueuse, comme un papillon qui se pose et s'envole, loin.
Et dans tout ce bruit, ce vacarme, règne une harmonie. 
J'ai oublié pourtant, le son de mon carillon. Un petit, trop petit, le son est encore un peu aigu pour me satisfaire, en bambou, des tronçons affûtés de 6 ou 7 tailles en ordre décroissant, qui s'amusent à titiller la boule de bois qui sème le trouble au milieu d'eux.
Voilà que je réalise que je ne sais pas photographier les sons. 
Tiens, les petits pas sur le plancher m'annoncent le réveil de la poulette. Celle qui s'endormait sur mon dos. Comme je le devine, c'est le silence de la tondeuse enfin rentrée et celui de mon joueur de biniou, sans doute fatigué, qui ont ouvert les yeux de la belle endormie. 

Mes mots se taisent, à bientôt...


2 commentaires:

  1. J'aime cette ambiance. Et j'aime le linge rèche, le sais-tu ?

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  2. Beaucoup de personnes aiment le linge rêche : c'st une volonté d'un retour à l'authenticité peut-être...

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