Souvent, la couleur a coulé du rouleau sur mon bras, tachant de bleu ou de blanc mes cheveux.
Si d'aventure il me reste du blanc d'ailleurs, n'y voyez point l'outrage des ans, juste le passage d'un pinceau trop audacieux.
Parfois, j'ai pu saisir la grosse brosse pour enduire d'huile un bardage trop sec, pour le nourrir de gouttelettes.
Aussi, j'ai pu tenter la peinture acrylique, celle qui recouvre, qui aplatit une image, un visage sur une toile.
Mais enfin, hier, ou peut-être était ce dans mes rêves, j'ai touché la peinture à l'huile.
Je me suis rappelé son atelier.
Une petite pièce sous les toits, qui empestait ce que je sais à présent être de l'essence de térébenthine. Une lucarne pour de la lumière blanche.
Un fatras de pinceaux et de pots, de tubes cornés, tout plissés, pliés comme les dentifrices usagés. Contre les murs, des châssis, des toiles, retournées, cachées, protégées des regards et des petites mains. Les petites mains qui jamais n'auraient osé...
Dans sa maison, les toiles achevées aux murs, comme une immense galerie d'art.
Et toujours un mystère.
Mais comment fait-on?
L'huile? mais quelle huile?
Et bien après, en histoire de l'art, les lumières, les transparences, les tableaux cachés sous les autres tableaux...
La peinture à l'huile, ou l'art d'entrer dans mon rêve d'enfant...
Nous avons choisi le format des toiles enduites de Gesso, fabriquées du châssis à la pointe par ces dames...
Nous avons réfléchi à la couleur, au "fond" du tableau. Tableau! quel beau mot!
Nous avons sorti les tubes, les palettes, les diluants...
Gras sur maigre.
Bien.
Pinceaux non, brosses, ah oui! mais rien à voir avec la brosse à chiendent, non, des rondes, des carrées, des souples comme de la soie...tu les poses sur ta main on dirait le pinceau de maquillage sur ta paupière.
La couleur...tu en prends une, et tu la mélange avec une autre...pour en faire une troisième...c'est bleu comme c'est étrange...
Tu saisis ton flacon d'essence, et tu dilues, encore pour en faire une peinture liquide, elle doit être bue par la toile, aspirée par ses fibres, c'est long le fond d'une toile...
Et puis tu peux recommencer avec un peu d'huile dans l'essence et là...et là, tu vois ta peinture déjà beaucoup plus souple, soyeuse, elle glisse, la brosse, elle longe le tableau encore et encore, c'est du patinage, c'est de la brillance, je me suis vue mettre mon pinceau de cuisine sur la brioche gonflée prête à enfourner, et je tire la peinture comme je tire le jaune d'oeuf sur la peau douce de la gourmandise.
J'ai eu l'impression de voir vivre la toile, elle ployait légèrement sous les caresses des soies, elle se faisait de plus en plus belle, de plus en plus lumineuse...
Ainsi, la peinture à l'huile joue sur les transparences et le geste sensuel...
Point de tableau, attendre...
(la trame de près, l'huile sur la trame, le bleu, bleu que j'aime)
COUCOU !
RépondreSupprimerHenri.
Que j'aimerais voir...
RépondreSupprimerLa peinture à l'huile c'est bien difficile...
RépondreSupprimerBeau texte sensuel, on dirait un chat qui peint...
Henri, Coucou! merci ;-) (mais mettre votre blog sous le nom serait du meilleur effet ;-) )
RépondreSupprimerVirginie, écoute, si le tableau voit le jour...
En fait de chat...je fais plutot la petite souris là ;-)
Non Patrick : Lapin dur à l'huile c'est bien difficile…
RépondreSupprimerPour le reste je suis d'accord.
@ Tifenn : la petite fille dans l'atelier, c'était toi en vrai ?
Marcus: à ton avis? vais-je trahir?
RépondreSupprimerTu m'a depuis que je viens ici, réconcilié avec le bleu...
RépondreSupprimerJ'aime le bleu marine des pulls, le bleu des jeans mais celui des tableaux et des murs je viens juste de m'appercevoir que je l'aime aussi ! Bon c'est vrai je reste rouge quand même mais bleu un peu, beaucoup et bientôt passionnément !
Et ça commence à se voir sur mon blog... Je t'imagine petite fille découvrant les toiles et les tubes dans l'atelier de... Je suis comme Marcus !
Le parfum de la térébenthine me fait penser au meuble de ma grand-mère paternelle....
Bises et merci pour ce très beau texte ou se mêle de si jolis souvenirs...
Bel hommage; Elle a dû te lire, que dis-je ? Plonger dans ton coeur et nourrir ta main, ça lui est si facile, elle est partout maintenant, chez toi, chez moi, chez tous ceux qui pensent à elle...
RépondreSupprimerAh le bleu ! j'en cloque partout, sur moi, chez moi en bretagne, dans mon coeur, je vois bleu ! mais aussi rouge de temps en temps, souvent même...
RépondreSupprimer"Quand je n'ai pas de bleu, je mets du rouge" disait Pablo !
BLEU?
RépondreSupprimerbleu vert, bleu intense, bleu gris, gros bleu, bleu de Prusse, bleu de cobalt, bleu pastel, bleu marine, bleu ciel
...Bleue Mère..